
Le Premier ministre thaïlandais Anutin Charnvirakul (Bumjaithai) a montré des signes d’agacement jeudi lors d’une conférence de presse consacrée à la lutte contre les arnaques en ligne. Interrogé sur les accusations visant un politicien identifié par l’initiale “Ch” et sur la demande de destitution du vice-Premier ministre Thamanat Prompao, Anutin a écourté brutalement son échange avec les journalistes.
L’affaire a été relancée par l’activiste Atchariya Ruangrattanapong, qui a transmis des informations à Rangsiman Rome, député du parti du Peuple, concernant un individu lié à des réseaux d’escroquerie. Anutin a réagi vivement : « Si vous voulez vraiment aider le pays, dites le nom clairement. Le chef de la police nationale garantira votre sécurité, et je demanderai au chef de l’armée d’en faire autant. »
Face à l’insistance des journalistes, Anutin a désigné le ministre du Numérique Chaichanok Chidchob, le fils du fondateur du parti Bumjaithai, en demandant ironiquement : « Pensez-vous qu’il est impliqué dans des arnaques en ligne ? » Il a critiqué le choix de transmettre les informations à l’opposition plutôt qu’aux autorités compétentes.
L’atmosphère s’est tendue davantage lorsqu’un journaliste a évoqué la proposition de Rangsiman Rome de limoger Thamanat Prompao, accusé d’avoir des liens avec des “business gris”, les mafias et des réseaux d’escroquerie. Thamanat, qui a passé des années en prison en Australie pour trafic de drogue, maintenant ministre de l’Agriculture et chef du parti Kla Tham, nie ces accusations. Anutin a coupé court : « Quel rapport avec notre lutte contre les arnaques ? », avant de quitter le podium.
Le Premier ministre Pheu Thai, Srettha Thavisin, avait été démis par la Cour Constitutionnelle pour avoir nommé un ministre qui avait été condamné par la justice thaïlandaise.
L’affaire la plus embarrassante pour Thammanat, et donc pour Anutin, est celle liée à Benjamin Mauerberger. Le Kla Tham Party, le parti de Thammanat et membre clé de la coalition dirigée par Bhumjaithai, défend Benjamin Mauerberger, conseiller du président du Sénat cambodgien Hun Sen. Mauerberger est accusé d’implication dans des réseaux d’escroquerie et de blanchiment en Thaïlande et au Cambodge, à des niveaux les plus élevés. Thammanat Prompao, chef de facto du parti, reconnaît le connaître et l’avoir aidé à porter plainte pour diffamation contre Rangsiman Rome, député du People’s Party, qui l’accuse d’être lié à ces réseaux. Une proposition de loi américaine (H.R. 5490) cite Mauerberger comme individu à surveiller. Le Kla Tham dénonce des accusations infondées et politiquement motivées.
Malgré ces tensions, Anutin a défendu l’action gouvernementale.
En parallèle, Anutin a évoqué la possibilité de dissoudre la Chambre dès le 31 janvier 2026, pour éviter une motion de censure jugée politisée. Cette décision, qui précéderait les élections prévues, s’inscrit dans une stratégie visant à éviter les « confrontations inutiles » et à maintenir le cap sur les priorités nationales. Lors d’une motion de censure, il est certain que l’opposition évoquerait les ministres liés aux différentes mafias.
Le Premier ministre, arrivé au pouvoir après avoir quitté la coalition Pheu Thai, se dit prêt pour une campagne anticipée, misant sur son plan “Quick Win” pour relancer l’économie et renforcer la sécurité aux frontières. Anutin qui bénéficie d’un certain « état de grâce » a tout intérêt à dissoudre rapidement.



