
SA KAEO — Alors que la Thaïlande et le Cambodge annoncent la création d’un groupe de travail conjoint pour lutter contre la cybercriminalité et la traite humaine, un nouvel incident frontalier vient raviver les tensions entre les deux voisins. Le 16 septembre, des villageois cambodgiens ont démonté une section de barbelés près de Ban Nong Ya Kaeo, dans le district de Khok Sung, provoquant une réaction immédiate de l’armée thaïlandaise.
Selon Bangkok, l’incident s’est produit « sans équivoque » sur le territoire thaïlandais. Le porte-parole de l’armée, le général Winthai Suvaree, accuse le Cambodge d’avoir violé l’accord de cessez-le-feu en laissant ses citoyens agir sous les yeux de militaires cambodgiens restés passifs. Il dénonce une tentative de provocation et de désinformation, affirmant que « certains veulent faire croire à une zone disputée, alors que la souveraineté thaïlandaise est claire ».
Côté cambodgien, les villageois affirment que les soldats thaïlandais ont étendu la ligne de barbelés, empiétant sur leur territoire. Une version que Phnom Penh n’a pas officiellement confirmée, mais qui alimente les soupçons d’un tracé frontalier mouvant, dessiné selon les souhaits des autorités thaïlandaises.
Selon des analystes de Bangkok, la Thaïlande se présente comme défenseur des normes internationales, mais refuse toute ingérence étrangère sur ses affaires internes. Lorsqu’il s’est agi d’envoyer des observateurs de l’ASEAN pour surveiller le cessez-le-feu avec le Cambodge, Bangkok a préféré limiter leur présence à des attachés militaires déjà sur place, illustrant un paradoxe : l’ouverture affichée à l’extérieur s’arrête aux frontières. Ainsi, contrairement au Cambodge, la Thaïlande refuse toute intervention neutre dans le tracé des frontières. Partant, les conflits sont inévitables.
Malgré cette tension, les deux pays ont signé un accord de coopération le même jour à l’hôtel Indochina de Sa Kaeo. Co-présidée par le général Thatchai Pitaneelaboot (Thaïlande) et le lieutenant-général Seang Thearith (Cambodge), la réunion a abouti à la création d’un groupe de travail de 24 membres chargé de rédiger un plan d’action contre les crimes technologiques et la traite humaine. Une version préliminaire est attendue le 25 septembre, avant validation finale le 30.
Le Cambodge accueillera également une réunion bilatérale sur le même thème le 26 septembre, dans une zone frontalière dont le lieu reste à préciser — un détail qui, dans le contexte actuel, n’est pas anodin.
Entre coopération affichée et tensions persistantes, la frontière thaïlando-cambodgienne reste un théâtre instable, où diplomatie et géopolitique se croisent au fil des barbelés. En effet, les zones en question ne couvrent que quelques mètres carrés — et pourtant, elles suffisent à alimenter « la guerre la plus bête du monde ».