La dynastie Shinawatra traverse une période de turbulences sans précédent. L’acquittement de Thaksin Shinawatra dans une affaire de lèse-majesté, le 22 août 2025, n’a offert qu’un bref répit. Blanchi faute de preuves explicites dans une interview datant de 2015, l’ancien Premier ministre reste au cœur d’un climat de défiance généralisée. Le tribunal a invoqué le doute raisonnable, mais cette décision ne dissipe ni les soupçons ni les tensions politiques.
Sa fille, Paetongtarn Shinawatra, Première ministre suspendue, est elle-même fragilisée par une affaire plus directe : une conversation enregistrée avec Hun Sen, dans laquelle elle aurait proposé un compromis politique en pleine crise frontalière. La Cour constitutionnelle doit trancher, et les éléments à charge sont jugés plus clairs que ceux du dossier de son père. Par ailleurs, l’« affaire du 14e étage », liée aux conditions de détention de Thaksin, pourrait accentuer la pression, avec des preuves visuelles et médicales à l’appui.
Dans les rues de Bangkok, la lassitude domine. Nombreux sont ceux qui dénoncent un système judiciaire à deux vitesses, où les élites semblent échapper aux sanctions tandis que les militants pro-démocratie restent emprisonnés. Le retour de Thaksin en 2023, après une grâce royale et une peine écourtée, alimente les soupçons d’accords secrets entre son clan et les militaires.
Sur le plan partisan, le Pheu Thai est en chute libre. Les sondages Nida révèlent une perte de popularité vertigineuse : de 28 % à 11,5 % en quelques mois. Paetongtarn voit son taux d’approbation tomber à 9,2 %, tandis que le People’s Party grimpe à 46 %. La fuite de son appel avec Hun Sen, jugé trop conciliant, a provoqué une onde de choc, notamment dans les bastions ruraux du Nord-Est, historiquement fidèles au Pheu Thai.
Des députés désertent le parti, dénonçant leur marginalisation. Le style centralisé des Shinawatra est critiqué, jugé incompatible avec les attentes d’un électorat en quête de renouvellement. Des rumeurs évoquent même un retour possible de l’ancien Premier ministre militaire Prayut Chan-ocha. Cependant, un sondage réalisé par le Pacific Institute of Management Science, portant sur 1 500 personnes à l’échelle nationale, a révélé que 68,1 % s’opposent à ce qu’un officier soit Premier ministre contre 4,3 % qui sont d’accord.
Face à cette crise, des stratégies de redressement sont suggérées : visites sur le terrain, aides concrètes et meilleure représentation régionale. La relance des politiques populiste est sur la table, mais l’échec, aussi retentissant qu’annoncé, du programme de distribution de 10 000 bahts à des millions de citoyens illustre bien les limites de ce type de mesure. Ce revers souligne que la Thaïlande a besoin de réformes structurelles et non de rustines appliquées à un système fragilisé.
Mais le temps presse. Si aucune action forte n’est engagée, les prochaines élections pourraient marquer la fin de l’hégémonie du Pheu Thai sur la scène politique thaïlandaise.
