
Parnpree Bahiddha-Nukara
Le ministre thaïlandais des Affaires étrangères a récemment exhorté les autorités militaires du Myanmar à éviter toute réaction violente suite à la perte de l’importante ville commerciale frontalière par l’armée birmane. Myawaddy, est désormais sous le contrôle virtuel des militants de l’Union nationale karen et de leurs alliés pro-démocratie.
La situation est délicate, car l’armée du Myanmar a subi une série de défaites sans précédent ces derniers mois, perdant des territoires frontaliers au profit de combattants ethniques. Les civils ont également pris les armes depuis que les généraux ont pris le pouvoir en 2021, renversant le gouvernement élu d’Aung San Suu Kyi. L’armée birmane a souvent réagi de manière brutale, utilisant notamment la puissance aérienne contre sa propre population.
La Thaïlande a clairement exprimé sa position concernant la situation à la frontière birmano-thaïlandaise. Le ministre thaïlandais des Affaires étrangères, Parnpree Bahiddha-Nukara, a déclaré que son pays ne tolérerait aucune “violation” de son territoire. Les soldats thaïlandais montent la garde le long de la frontière pour protéger la souveraineté du pays.
La Thaïlande partage une frontière de 2 400 kilomètres avec la Birmanie, où le coup d’État militaire de 2021 a ravivé les tensions avec les minorités ethniques. La situation reste tendue, et la prise complète de Myawaddy par les forces opposées constituerait une défaite humiliante pour les généraux birmans.
Le major-général Zaw Min Tun, porte-parole de la junte, a confirmé que les soldats de la dernière base de l’armée à l’extérieur de la ville de Myawaddy avaient quitté leur poste pour protéger leurs familles vivant avec eux. Il a également reconnu la présence de forces karens à l’intérieur de la ville.
Maintenant tout le monde craint que l’armée du Myanmar ne lance une contre-attaque concertée contre Myawaddy, ce qui pourrait entraîner des milliers de personnes à fuir vers la Thaïlande pour se mettre en sécurité et perturberait gravement le commerce frontalier.
Le ministre thaïlandais des Affaires étrangères, Parnpree Bahiddha-Nukara, a déclaré que la Thaïlande avait déjà communiqué avec l’armée birmane pour exprimer son souhait de maintenir la paix à Myawaddy. Il a offert l’aide de la Thaïlande et espère que des pourparlers pourront avoir lieu entre les parties opposées pour éviter des représailles violentes.
Cependant, vendredi soir, au moins deux fortes explosions ont été signalées du côté birman de l’un des deux ponts reliant Myawaddy et Mae Sot. La cause de ces explosions reste inconnue pour le moment.
Les habitants des deux rives de la rivière ont déclaré plus tôt qu’il y avait eu de fréquentes explosions ces derniers jours suite à des frappes aériennes contre des positions capturées à l’extérieur de la ville de Myawaddy, mais que vendredi fut calme. Les responsables de l’immigration thaïlandais ont déclaré que le nombre de visiteurs en provenance du Myanmar n’était pas exceptionnel.
Mais pour certains, le problème c’est justement le calme qui pourrait précéder la tempête.
Les troupes thaïlandaises surveillaient Mae Sot vendredi, notamment près des ponts. En plus de rassurer les résidents, ils empêchaient des soldats birmans piégés de traverser la frontière.
L’Union nationale Karen a déclaré vendredi dans un communiqué publié sur sa page Facebook qu’elle mettrait en place une administration, empêcherait les entreprises illicites, la contrebande et la traite des êtres humains, assurerait la stabilité et l’application de la loi et faciliterait commerce dans la région de Myawaddy lorsqu’elle y sécurisera sa position.
La KNU s’est déclarée profondément préoccupée par la sécurité des personnes vivant des deux côtés de la frontière, cherche à assurer l’accès à l’aide humanitaire et s’efforce de parvenir à une coopération significative avec le gouvernement thaïlandais et les organisations locales et internationales.
Les Karen, originaires de l’État oriental de Kayin, se battent depuis plus de sept décennies pour une plus grande autonomie par rapport au gouvernement central du Myanmar. Une lutte plus large incluant d’autres groupes ethniques minoritaires et des militants pro-démocratie a commencé après la prise de pouvoir par l’armée en 2021.
Samedi, on apprenait que Les forces rebelles Karen ont lancé la veille au soir des attaques de drones pour bombarder les troupes du gouvernement birman qui se sont réfugiées près du deuxième pont de l’amitié entre la Thaïlande et le Myanmar, dans le district de Mae Sot, Tak.
Les troupes thaïlandaises, déployées sur le pont pour empêcher un éventuel débordement des combats sur le territoire thaïlandais, ont immédiatement ordonné aux membres des médias de quitter la zone pour leur sécurité.
Pendant ce temps, à la périphérie de la commune de Myawaddy, les combats se sont poursuivis toute la nuit de vendredi, malgré la chute de la commune et du dernier camp militaire de la junte.
Entre-temps, il a été rapporté que depuis le début de la bataille pour Myawaddy samedi dernier, le nombre de civils du Myanmar demandant un laissez-passer pour entrer dans la ville thaïlandaise de Mae Sot au poste frontière est passé de 3 000 à 4 000 par jour.
Les laissez-passer frontaliers permettent aux citoyens birmans de rester en Thaïlande pendant sept jours maximum. La plupart logent chez des proches vivant à Mae Sot, tandis que d’autres séjournent à l’hôtel.
On rapporte que nombre de personnes sont arrivées à Mae Sot hier pour célébrer la fête de Songkran.
Selon la Thai Real Estate Association, les achats de condos en Thaïlande par de riches Birmans ont considérablement augmenté depuis février, lorsque la junte du Myanmar a imposé la conscription militaire obligatoire pour les hommes âgés de 18 à 32 ans et les femmes âgées de 18 à 27 ans.
Les citoyens du Myanmar possèdent désormais 564 logements en copropriété en Thaïlande, d’une valeur totale de 3,7 milliards de bahts.