
Le chef de la 2e armée thaïlandaise.
Alors que de plus en plus de médias utilisent le terme de « guerre la plus bête du monde », la Thaïlande a rejeté toute médiation étrangère pour résoudre le conflit armé en cours avec le Cambodge, préférant une approche bilatérale. Bangkok estime que Phnom Penh doit cesser ses attaques avant toute négociation. Depuis plusieurs jours, les échanges d’artillerie se multiplient le long de la frontière, causant la mort d’au moins 16 personnes jeudi, majoritairement des civils thaïlandais, et le déplacement de plus de 140 000 habitants dans les deux pays. On ne connaît pas précisément les pertes civiles et militaires côté cambodgien.
Le ministère thaïlandais des Affaires étrangères, par la voix de son porte-parole Nikorndej Balankura, a affirmé que la solution ne devait passer que par le dialogue entre les deux capitales. Cette position s’oppose aux offres de médiation proposées par la Chine, les États-Unis et la Malaisie, actuelle présidente de l’ASEAN. En parallèle, le Premier ministre cambodgien Hun Manet a saisi le Conseil de sécurité de l’ONU, dénonçant une « agression militaire préméditée » de Bangkok. Une réunion à huis clos a été convoquée vendredi à New York.
La Thaïlande accuse, à juste titre, son voisin d’avoir utilisé des lance-roquettes BM-21 dans des zones civiles ; elle a riposté avec des avions de chasse F-16 jeudi et à nouveau vendredi.
Trois militaires thaïlandais auraient été tués ce vendredi au temple de Ta Kwai. Les combats dans ces minuscules temples pourraient se révéler fort meurtriers et se terminer quasiment au corps à corps tant l’espace est réduit. Cependant, si les tirs se limitaient aux temples, les civils seraient épargnés.
Les Thaïlandais sont prêts à tout pour prendre possession de ces temples que les cartographes français et siamois ont situés au Cambodge en 1907. Les autorités siamoises avaient avalisé ces cartes.
Ces violences prolongent une querelle territoriale qui dure depuis plus d’un siècle. Le temple hindou de Preah Vihear cristallise la dispute : attribué au Cambodge en 1962 par la CIJ, la Thaïlande conteste les terres environnantes. En 2008, la tentative d’inscription du site à l’UNESCO par Phnom Penh a ravivé les tensions. D’autres points frontaliers, comme le temple Ta Moan Thom, ont également suscité des frictions récentes. La CIJ a, à nouveau, pris parti pour le Cambodge. C’est la raison pour laquelle la Thaïlande ne veut plus entendre parler de médiation internationale contrairement au Cambodge.
La création d’une commission de délimitation des frontières en 2000 a apporté peu de progrès puisque la Thaïlande n’accepte pas les frontières telles qu’internationalement reconnues et que le Cambodge ne veut pas céder un pouce de son territoire.
Malgré leur rivalité historique, les gouvernements actuels de Thaïlande et du Cambodge entretenaient des liens chaleureux. Mais, selon le Bangkok Post, le sentiment nationaliste a augmenté en Thaïlande après que les ultraconservateurs ont remis en question le projet du gouvernement de négocier avec le Cambodge pour explorer conjointement les ressources énergétiques dans des zones maritimes non délimitées.
En mai dernier, les deux pays s’étaient engagés à réduire les tensions, sans succès. C’est aussi en mai que l’ancien Premier ministre cambodgien Hun Sen s’est lancé dans une campagne terriblement agressive contre la Thaïlande et la famille Shinawatra jusqu’à déstabiliser la Thaïlande. Il a réussi à exacerber un sentiment ultranationaliste dans son pays et à galvaniser dangereusement la population.