
Le Cabinet du Premier ministre Anutin Charnvirakul, composé de 36 membres occupant 41 postes, a reçu l’aval royal et a été publié dans la Gazette royale le 18 septembre. Anutin cumule les fonctions de chef du gouvernement et de ministre de l’Intérieur.
La coalition au pouvoir regroupe trois partis : Bhumjaithai (12 membres, 14 sièges), Kla Tham (7 membres, 8 sièges) et Palang Pracharath (4 membres, 4 sièges), ainsi que deux groupes politiques issus de scissions, dont Ruam Thai Sang Chart et Pheu Thai. Neuf ministres externes, sans affiliation partisane, complètent l’équipe, principalement désignés via les quotas de Bhumjaithai.
La province de Buriram, bastion du clan Chidchob, est fortement représentée avec six figures politiques ou militaires, dont Anutin lui-même, deux députés, un ancien commandant de police et un ex-général ayant supervisé les tensions frontalières avec le Cambodge.
La cérémonie de prestation de serment est prévue le 24 septembre, suivie de la déclaration de politique générale au Parlement avant la fin du mois. Ce discours déclenchera le compte à rebours de quatre mois convenu avec le principal parti d’opposition, le Parti du Peuple, pour dissoudre la Chambre et convoquer de nouvelles élections.
La composition du Cabinet a été scrutée avec rigueur, notamment après la destitution de Srettha Thavisin pour avoir nommé un ministre au passé contestable.
Parmi les plus controversés figure Thammanat Prompao, nommé vice-Premier ministre et ministre de l’Agriculture. Anciennement condamné à quatre ans de prison en Australie pour trafic de drogue en 1994, il avait été écarté du précédent gouvernement Paetongtarn. Bien que la Cour constitutionnelle ait jugé en 2021 que cette condamnation étrangère ne l’empêchait pas de siéger en Thaïlande, elle n’a jamais statué sur les implications éthiques de son retour au pouvoir.
Suchart Chomklin, qui a « offert » 17 députés du parti Ruam Thai Sang Chart à la coalition d’Anutin, a été accusé d’être impliqué dans un trafic d’êtres humains lié à la cueillette de baies en Finlande alors qu’il était ministre du Travail. Suchart est nommé ministre de l’Environnement.
Pattana Promphat est le fils du secrétaire général du PPRP, parti pro-armée, Santi Promphat, lié possiblement au scandale du siège de la Sécurité Sociale. Santi ne pouvant être nommé, Pattana devient ministre de la Santé.
La nomination de Général de police Rutthapol Naowarat comme ministre de la Justice interroge également, compte tenu de ses liens étroits avec le clan Chidchob, pilier du parti Bhumjaithai et influent dans la province de Buriram. Cette concentration de pouvoir régional soulève des inquiétudes sur la neutralité des institutions judiciaires.
Si Anutin promet un gouvernement guidé par l’intégrité, la composition de son cabinet reflète surtout un savant dosage d’alliances politiques et de fidélités régionales, c’est-à-dire du clientélisme qui régit la vie politique thaïlandaise depuis des décennies. À l’approche de la déclaration de politique générale, prévue avant fin septembre, les regards se tournent vers le Parlement, où l’opposition pourrait rapidement lancer une motion de censure si les promesses de dissolution ne sont pas tenues. Le mandat d’Anutin commence sous haute surveillance.