
Paul Chambers et son bracelet
La Thaïlande continue de faire face à des défis significatifs en matière de droits humains, malgré les changements politiques et les modifications de certaines politiques, selon Bancha Leelakueakoon, directeur d’Amnesty International Thaïlande. Lors de la présentation du rapport annuel 2024/25 de l’organisation, il a souligné que la situation générale reflète un cadre structurel restreignant l’espace de la société civile et ne priorisant pas suffisamment les principes des droits de l’homme.
Plusieurs exemples illustrent ces préoccupations. L’expulsion de réfugiés ouïghours vers la Chine, malgré les obligations internationales, et celle de Y Quynh Bdap vers le Vietnam, en dépit de son statut de réfugié, montrent des violations flagrantes des droits des réfugiés. De plus, l’accueil du chef de la junte birmane Min Aung Hlaing, responsable de graves violations des droits humains, au sommet de la BIMSTEC à Bangkok, et les poursuites contre l’universitaire américain Paul Chambers pour lèse-majesté, témoignent de tendances inquiétantes.
Actuellement, plus de 1 960 personnes en Thaïlande sont poursuivies pour avoir participé à des manifestations ou exprimé des opinions politiques. Parmi elles, 279 sont inculpées en vertu de la loi sur le crime de lèse-majesté, dont 33 sont toujours en détention provisoire. Des figures comme le militant pro-démocratie Mongkol « Bas » Thirakhot, condamné à plus de 54 ans de prison, et le défenseur des droits humains Arnon Nampa, condamné à plus de 22 ans, illustrent la sévérité des peines. La mort de la militante Netiporn « Bung » Sanesangkhom, après une grève de la faim de 110 jours en prison, souligne la fragilité de la liberté d’expression et de la dignité humaine en Thaïlande.
Le rapport met également en lumière la dissolution du parti Move Forward par la Cour constitutionnelle en 2024, perçue comme une atteinte aux droits des citoyens à la participation politique. L’absence de poursuites pour le massacre de Tak Bai, dont le délai de prescription a expiré en octobre 2024, reflète une culture d’impunité profondément ancrée.
Malgré des progrès, comme l’adoption de la loi sur le mariage pour tous, des défis subsistent. Les défenseurs des droits humains, notamment les femmes et les personnes LGBTQ+, continuent de subir surveillance, menaces numériques et violations. Le rapport d’Amnesty International « Être soi-même est trop dangereux » a révélé l’impact des violences sexistes via les technologies sur les militants. En juin, des experts de l’ONU ont exprimé leur inquiétude face à la surveillance exercée par le Commandement des opérations de sécurité intérieure (ISOC) sur des défenseurs des droits humains.
L’accusation de crime de lèse-majesté contre Paul Chambers pourrait également affecter les négociations tarifaires avec les États-Unis. Chambers, accusé pour un texte promotionnel, nie avoir écrit ou publié ce texte. Il a été arrêté le 8 avril, son passeport confisqué, et il porte un bracelet électronique. Les États-Unis considèrent cette arrestation comme injustifiée et pourraient imposer des sanctions en vertu d’une loi protégeant les Américains injustement détenus à l’étranger. La famille de Chambers a contacté la Maison-Blanche, le Département d’État et le Congrès, et un sénateur américain les soutient.