
Les 37 opposants
Le processus de désignation des membres d’organismes de surveillance indépendants par le Sénat thaïlandais suscite une vive controverse.
Des postes clés doivent être pourvus et les Sénateurs sélectionnent les candidats :
- Deux candidats à la Cour constitutionnelle
- Un candidat au poste de procureur général
- Trois candidats à la Commission nationale de lutte contre la corruption
- Un candidat à la Commission électorale
Dès hier, le Sénat a voté à 138 voix contre 2 pour nommer un candidat à la Commission nationale de lutte contre la corruption. Piansak Sombathong, du Bureau du procureur général, a été élu. Deux autres candidats ont été rejetés : Prakob Leenapesnant, ancien juge en chef de la Cour suprême, et Prachuap Tantinon, ancien dirigeant d’une entreprise publique.
Face à cette situation, 37 sénateurs opposés à ces nominations se sont abstenus et entendent contester la décision en déposant une requête auprès du président de l’Assemblée nationale, Wan Muhamad Noor Matha, qui est aussi président du Parlement dans son ensemble, pour obtenir une enquête parlementaire sur les sénateurs ayant validé les nominations.
Ces 37 sénateurs dénoncent des violations de procédure et des conflits d’intérêts pouvant justifier une éventuelle destitution.
Le conflit d’intérêts est évident. Comment des juges nommés par le Sénat pourraient-ils destituer les 130 sénateurs accusés de corruption qui les ont nommés ?
Un comité conjoint entre la Commission électorale et le Département des enquêtes spéciales de la police examine des allégations de collusion impliquant jusqu’à 130 sénateurs et des membres du Parti Bhumjaithai.
La sénatrice Nantana Nantavaropas et d’autres élus du groupe minoritaire ont tenté d’alerter sur les risques juridiques et éthiques de ces décisions, mais leur opposition n’a pas suffi à modifier le cours des événements. Malgré les critiques et les inquiétudes exprimées par la société civile sur une concentration excessive du pouvoir, la majorité sénatoriale a maintenu le processus de nomination, fragilisant la confiance citoyenne envers les institutions.
Certains ont plaidé pour un report d’un à deux mois afin de permettre un examen indépendant, mais cette requête a été rejetée. En effet, plus les sénateurs, possiblement corrompus, nommeront rapidement les juges qui devront statuer sur eux, plus ils consolident leur pouvoir. Par ailleurs, les mêmes juges peuvent s’en prendre aux adversaires politiques du Bumjaithai selon leur bon plaisir.
L’avocat Pattharapong Supaksorn envisage de saisir la Commission nationale anticorruption et le médiateur pour évaluer d’éventuelles infractions aux normes éthiques et à la Constitution, qui interdit toute affiliation politique aux sénateurs sous peine de destitution. Malheureusement, pour ce faire il devra s’adresser à des organisations déjà largement noyautées par le régime.
Cette affaire pourrait donc avoir des répercussions profondes sur l’équilibre du pouvoir politique en Thaïlande.