Sumet Ongkittikul, PhD, est vice-président de l’Institut thaïlandais de recherche sur le développement. Ceci est un extrait de son article « Entraîner la Thaïlande vers un transport à faible émission de carbone ».
La Thaïlande, conformément aux objectifs climatiques mondiaux, s’est engagée à réduire de 40 % les gaz à effet de serre issus du transport terrestre d’ici une décennie. Il lui faut désormais passer à l’action.
Les transports contribuent à 30 % des émissions de carbone de la Thaïlande, soit plus de 80 millions de tonnes métriques par an. Sans intervention, les émissions pourraient atteindre 110 millions de tonnes d’ici 2030 et être multipliées par 2,5 fois d’ici 2050.
La Thaïlande s’est engagée à respecter l’Accord de Paris en s’engageant à réduire les émissions du transport routier de 80 à 62 millions de tonnes. Un échec menacera l’économie, car il dissuadera les investisseurs et les touristes.
Alors que le gouvernement a mis en place des politiques promouvant les véhicules électriques, améliorant l’efficacité des véhicules, développant des systèmes de transport et encourageant les énergies alternatives, les combustibles fossiles continuent de régner.
En raison de l’insuffisance des infrastructures de transports publics, la Thaïlande aura du mal à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Mais pour rester crédible, la Thaïlande doit respecter les normes internationales d’émission de carbone dans les transports, ce qui est crucial pour le tourisme.
D’ailleurs, Le rapport sur les voyages durables 2023 de Booking.com révèle que 80 % des personnes interrogées donnent la priorité au tourisme durable, 76 % d’entre elles visant des voyages plus respectueux de l’environnement et 43 % étant prêtes à payer un supplément pour des transports plus propres.
Il existe notamment une préférence croissante pour les transports publics à faibles émissions de CO2, en particulier les trains.
Les efforts de la Thaïlande pour réduire l’utilisation des combustibles fossiles se heurtent cependant à plusieurs obstacles. L’objectif ambitieux du gouvernement de 30 % de véhicules électriques d’ici 2030 sera difficile à tenir car les consommateurs traînent les pieds. Malgré le soutien politique, les véhicules électriques sont pour la plupart limités aux zones urbaines pour de courts trajets, entravés par l’insuffisance des bornes de recharge. De plus, nle gouvernement ne fait rien concernant les motos, les bus et les camions électriques, qui sont de grands émetteurs de carbone. Certaines villes de Chine ou de Taïwan n’autorisent plus les scooters à essence.
De plus, les transports publics urbains ne réduisent pas la consommation de combustibles fossiles comme prévu. Malgré les métros de Bangkok, l’utilisation de combustibles fossiles ne cesse de croître en raison de déplacements peu pratiques. Ces itinéraires ne couvrent que 28 % de la ville, avec des billets coûteux, des systèmes de desserte inadéquats et une mauvaise intégration de la billetterie, ce qui incite les gens à préférer les voitures privées.
Pendant ce temps, les bus publics, avec 269 lignes couvrant 57 % de Bangkok, ne bénéficient pas du soutien du gouvernement pour passer à l’électricité et se moderniser afin d’améliorer le service public. Certains bus, âgés d’au moins 30 ans, continuent d’arborer de fiers panaches noirs. Les péages urbains, qui réussissent à promouvoir les transports publics dans d’autres pays, ne sont toujours pas appliqués en Thaïlande.
Les problèmes des transports publics en dehors de Bangkok sont encore pires avec une dépendance totale aux combustibles fossiles. Voici la couverture géographique des transports en commun : 13 % à Chachoengsao, 20 % à Chiang Rai, 26 % à Khon Kaen, 36 % à Songkhla et 46 % à Ayutthaya.
Le transport ferroviaire interurbain reste limité, tant pour les passagers que pour le fret, perpétuant la dépendance à l’égard du transport routier à forte intensité de carbone.
Les projets de l’État concernant des voies doubles, des trains à grande vitesse et de nouveaux itinéraires avancent trop lentement.
De plus, l’inefficacité des services ferroviaires fait que sur la route Bangkok-Chiang Mai en 2022, 3 734 passagers ont utilisé les trains, contre 11 698 l’avion.
La demande est là, mais peu de personnes utilisent les trains en raison d’une fréquence insuffisante, de la lenteur, des retards, des conditions sanitaires nulles, de la faible qualité du service et de la couverture insuffisante du pays.
De même, le fret ferroviaire souffre de son inefficacité : avec seulement 164 locomotives utilisables et des gares de transfert de marchandises inadéquates, les coûts élevés liés aux multiples monte-charges. 25 % pour le fret ferroviaire contre 75 % pour le transport routier.
Les problèmes d’émissions de carbone de la Thaïlande sont encore aggravés par l’augmentation du transport aérien sans contrôle efficace.
Une telle inaction menacera l’industrie touristique thaïlandaise. L’Organisation de l’aviation civile internationale a fixé des objectifs de zéro émission. Si la Thaïlande ne respecte pas les normes, les voyageurs pourraient éviter le pays et les compagnies aériennes pourraient éviter nos aéroports.
Face à la pression mondiale en faveur de transports à faibles émissions de carbone, la Thaïlande doit investir dans les transports verts, en soutenant les véhicules à faibles émissions de carbone tels que les bus, les scooters et les camions électriques.
Pour accélérer l’utilisation des véhicules électriques, le gouvernement doit apporter un soutien financier aux opérateurs de bus électriques et des subventions aux acheteurs de camions électriques.
Il est important que le gouvernement mette fin aux subventions aux combustibles fossiles et introduise une taxe sur les carburants basée sur le carbone.
Le système de transports en commun a également besoin d’une refonte. Il s’agit de passer aux bus électriques avec des extensions d’itinéraires et des connexions faciles avec les métros. Les lignes d’autobus interprovinciales doivent également être élargies pour offrir une couverture complète.
Cela signifie aussi améliorer la fréquence, les arrêts et les sentiers piétonniers. Et bien sûr, il faut un système de ticket unique.
Bangkok devrait également établir des zones à faibles émissions, en imposant des péages urbains pour réduire l’utilisation de la voiture et promouvoir les transports en commun.
Toutes ces décisions sont bien connues et sont politiques. Elles sont indispensables si le royaume ne veut pas se retrouver déclassé sur le plan mondial.
Jeudi, Matichon affirmait que 25 provinces du pays avaient des niveaux de poussière dépassant le niveau standard à un niveau et ayant un impact négatif sur la santé, les 5 principales étant Ang Thong 141,4 microgrammes, Chainat 134,2 microgrammes, Nonthaburi 122,5 microgrammes, Pathum Thani 121 microgrammes et Singburi 120,7
On apprend aussi que les députés de la coalition au pouvoir veut déposer un projet de loi pour promouvoir un « air plus propre ». Le premier ministre qui n’est pas partie prenante serait d’accord.
Le projet de loi vise à développer un système qui s’attaque directement aux sources de pollution, ainsi qu’une plateforme d’évaluation de la qualité de l’air plus efficace pour les utilisateurs.
On notera que l’écobuage, les feux de forêts ou les moteurs crachant de la fumée sont déjà interdits par la loi. Une loi que la police ne fait pas respecter.
