
Dr Kirida
La Thaïlande fait face à une pression accrue pour réformer ses secteurs industriel et agricole, alors que les négociations tarifaires avec les États-Unis pourraient bouleverser ses équilibres commerciaux. La Dr Kirida Bhaopichitr, économiste de premier plan au sein du TDRI (Institut thaïlandais de recherche sur le développement), alerte sur les risques majeurs liés à une ouverture trop rapide du marché thaïlandais aux produits américains. Alors que l’Indonésie a déjà conclu un accord fixant ses tarifs à 19 %, la Thaïlande peine à abaisser les siens, actuellement à 36 %, ce qui compromet sa compétitivité.
Face à cette situation, le ministre des Finances Pichai Chunhavajira propose une ouverture partielle du marché. Cependant, selon la Dr Kirida, cette stratégie doit impérativement s’accompagner d’un soutien gouvernemental renforcé. Il ne suffit pas d’offrir une aide financière ponctuelle : une transformation structurelle est nécessaire. Elle plaide pour une politique de financement immédiat et un appui politique solide visant à moderniser les entreprises locales et améliorer leur compétitivité. La formation professionnelle, délaissée par tous les gouvernements successifs, doit enfin être prise au sérieux.
En ce sens, le ministère des Finances a lancé un plan de soutien aux PME, en collaboration avec les banques publiques, mobilisant 200 milliards de bahts de prêts à taux réduit. Cette mesure vise à atténuer les effets d’une ouverture commerciale accrue.
Malgré les incertitudes, certains secteurs conservent leur potentiel. Kirida met en avant la joaillerie, les biotechnologies issues du secteur agricole, ainsi que la soie grège, comme produits capables de maintenir leur performance sur le marché américain, grâce à leur qualité reconnue et une demande constante. Toutefois, elle prévient que si les droits de douane ne sont pas révisés, la croissance globale des exportations pourrait plafonner à 1 % en 2025.
Le marché américain représentant près de 18 % des exportations thaïlandaises, une contraction est à prévoir au second semestre 2025, à moins d’une diversification rapide. Dr Kirida suggère d’explorer un accord de libre-échange avec l’Union européenne, afin de limiter la dépendance à un seul partenaire commercial.
En somme, la Thaïlande est à un tournant décisif : elle doit conjuguer réforme, anticipation stratégique et diversification pour préserver sa place dans le commerce mondial. Les tensions tarifaires en cours sont autant de défis que de catalyseurs pour une mutation économique nécessaire.