
Les inondations qui frappent actuellement le sud de la Thaïlande menacent gravement la filière du caoutchouc naturel, pilier économique et social du pays. L’Autorité nationale du caoutchouc estime que près de 90 000 tonnes métriques pourraient être perdues, soit une valeur de 4,5 milliards de bahts (140 millions de dollars). Déjà, 40 000 tonnes ont été détruites dans neuf provinces, et plus de 160 000 agriculteurs sont touchés par la submersion de 656 000 hectares de plantations. Les cours à terme du caoutchouc au Japon ont immédiatement réagi à ces inquiétudes d’approvisionnement.
La province de Songkhla, cœur de la production, a reçu plus de 630 mm de pluie en quelques jours, dépassant le précédent record de 2010. Les dégâts humains sont lourds : plus de 100 morts en Thaïlande, tandis que des dizaines de milliers de personnes ont dû être évacuées. Les usines de Sri Trang Agro-Industry et sa filiale Sri Trang Gloves ont suspendu leurs activités, incapables d’accueillir le personnel ou de protéger les installations envahies par l’eau. L’impact économique global est évalué à 25 milliards de bahts (776 millions de dollars), avec des risques d’aggravation si la chaîne industrielle reste paralysée.
Ces événements rappellent la vulnérabilité d’un secteur vital. La Thaïlande est le premier producteur mondial de caoutchouc naturel, avec près de 5 millions de tonnes par an, dont plus des trois quarts destinés à l’exportation. L’hévéa, introduit au début du XXe siècle, s’est imposé comme une culture stratégique, particulièrement dans le sud du pays où les conditions climatiques sont favorables. Aujourd’hui, plus de la moitié des 24 millions de rai de plantations se concentrent dans cette région. Le caoutchouc représente non seulement une source majeure de devises, mais aussi un revenu essentiel pour des centaines de milliers de petits exploitants.
L’importance de l’hévéa dépasse la sphère agricole : il alimente des industries mondiales clés, de l’automobile aux équipements médicaux. La Thaïlande occupe une position centrale dans cette chaîne, et toute perturbation de sa production a des répercussions internationales. Les inondations de 2024 avaient déjà entraîné une baisse de 3 % de la production nationale. La répétition de ces catastrophes souligne la nécessité d’investissements dans la résilience climatique et la diversification économique, afin de protéger une filière qui reste au cœur de l’identité et de la prospérité thaïlandaises.



