Les portes du pénitencier, sur Thaksin, se sont refermées

La Cour suprême thaïlandaise a ordonné l’incarcération de Thaksin Shinawatra pour une durée d’un an, excluant la période passée à l’hôpital de la police du calcul de sa peine. Cette décision intervient après un long débat public sur le traitement privilégié qu’aurait reçu l’ancien Premier ministre, revenu d’exil en 2023.

Thaksin, initialement condamné à huit ans pour abus de pouvoir, avait vu sa peine réduite par grâce royale. Son hospitalisation prolongée avait suscité des doutes sur la gravité réelle de son état, conduisant à une enquête judiciaire et à des sanctions contre plusieurs médecins.

Il a été directement conduit de la Cour suprême, située sur Chaengwattana, à la Remand Prison, sur Ngamwongwan, toute proche.

Bien que cette décision judiciaire soit censée réaffirmer l’État de droit, elle pourrait paradoxalement renforcer Thaksin et son parti Pheu Thai, en ravivant le soutien populaire dont il bénéficie, notamment parmi les classes défavorisées. D’autant que le soutien du parti du Peuple au très droitier Bumjaithai ressemble à une trahison.

Le retour inattendu de Thaksin en Thaïlande le 8 septembre 2025, après une brève autorisation de sortie et un aller-retour à Dubai, a surpris les conservateurs qui espéraient qu’il resterait à l’étranger pour éviter sa peine. Ce revirement médiatisé pourrait se retourner contre ses opposants, comme l’histoire l’a montré avec des figures telles qu’Indira Gandhi ou Juan Perón, dont l’emprisonnement a précédé un retour triomphal.

Certains analystes estiment que cette incarcération pourrait devenir un catalyseur pour les forces libérales, en perturbant les stratégies conservatrices fondées sur le statu quo et les arrangements en coulisses.

Des tractations en coulisses ont bel et bien eu lieu — et perdurent. Selon certains observateurs, Thaksin aurait pu négocier, avec les autorités en place, son retour en 2023 et une incarcération dans les conditions privilégiées de l’hôpital de la police en échange d’un compromis politique. Celui-ci aurait impliqué notamment l’abandon du soutien au parti Future Forward, rapidement dissous par la justice, et dont les dirigeants ont été exclus de la vie publique.

Mais la confrontation entre Thaksin et le pouvoir en place dure depuis deux décennies. Une fois Paetongtarn écartée par la Cour constitutionnelle et Anutin propulsé à la tête du gouvernement, Thaksin semblait avoir perdu toute utilité stratégique. Conscient de ce changement de rapport de force, il est parti pour Dubaï

Son retour hier soulève des interrogations : cherche-t-il à incarner le rôle du martyr politique ou a-t-il conclu un nouvel accord avec le « régime » lui garantissant une courte détention symbolique dans un hôpital pénitentiaire — un lieu que peu envient, malgré son apparente tranquillité ?

Dans un message publié sur les réseaux sociaux, Thaksin Shinawatra a exprimé sa gratitude envers ses soutiens. Il a salué la grâce royale qui a réduit sa peine initiale et affirmé accepter le jugement avec humilité.

L’ancien Premier ministre a rappelé son engagement passé à améliorer la vie des Thaïlandais et à instaurer une démocratie fondée sur des politiques concrètes. Malgré les poursuites engagées après le coup d’État de 2006, il dit vouloir tourner la page et se concentrer sur l’avenir.

Thaksin a remercié les membres du Pheu Thai, les responsables politiques et les citoyens qui l’ont soutenu, affirmant qu’il reste animé par les mêmes idéaux. “Même sans liberté, je conserve la liberté de pensée”, a-t-il déclaré, promettant de consacrer le reste de sa vie au service du pays, de la monarchie et du peuple thaïlandais.

Paetongtarn Shinawatra a réagi en qualifiant ce moment d’historique — c’est la première fois qu’un ancien Premier ministre thaïlandais est emprisonné. Elle a exprimé son inquiétude personnelle tout en soulignant la force de sa famille et leur gratitude envers le roi pour avoir commué la peine.

Elle a également salué les réalisations politiques de Thaksin, qu’elle considère comme un leader spirituel dont l’engagement envers le bien-être du peuple reste intact. En tant que cheffe du parti Pheu Thai, elle affirme poursuivre son travail parlementaire dans l’opposition, fidèle aux intérêts des citoyens.