Depuis l’entrée en vigueur de la loi sur le mariage pour tous en Thaïlande, le 23 janvier, de nombreux couples célèbrent leur union. Mais derrière cette avancée historique, des zones grises subsistent, notamment pour les couples binationaux et les familles recomposées. Deux points sensibles émergent : l’accès à la nationalité et les procédures d’adoption.
Côté nationalité, la loi thaïlandaise reste marquée par une inégalité de traitement. Jusqu’à récemment, une femme étrangère mariée à un Thaïlandais pouvait obtenir la nationalité facilement (article 9 de la loi de 1965), tandis qu’un homme étranger marié à une Thaïlandaise devait passer par la naturalisation (article 10), avec des conditions strictes : cinq ans de résidence, maîtrise du thaï, revenus élevés. Une réforme récente (article 11) a assoupli ces critères pour les hommes, mais la logique reste genrée.
Avec l’ouverture du mariage aux couples de même sexe, une question se pose : quelle règle appliquer lorsqu’un Thaïlandais ou une Thaïlandaise épouse un(e) étranger(ère) du même sexe ? Le système doit évoluer vers une approche neutre, fondée sur l’égalité des droits, comme l’a souligné le comité CEDAW de l’ONU, qui dénonce la discrimination envers les femmes thaïlandaises mariées à des étrangers.
Autre défi : l’adoption. La loi thaïlandaise autorise les couples mariés à adopter, mais impose des critères précis : 25 ans minimum, 15 ans d’écart avec l’enfant, consentement des parents biologiques et de l’enfant s’il a plus de 15 ans. Les adoptions internationales sont encadrées par la loi de 1979 et les conventions internationales (Hague, Droits de l’enfant), avec des contrôles renforcés pour éviter les abus.
Mais une situation particulière révèle une incohérence juridique à cet égard. Le problème survient lorsque l’un des conjoints a déjà un enfant — qu’il soit biologique ou adopté — et que l’autre souhaite adopter cet enfant.
🔹 Si l’enfant est déjà adopté par le premier conjoint avant le mariage, alors le second conjoint peut également l’adopter. Dans ce cas, les deux époux partagent l’autorité parentale sur l’enfant. C’est une reconnaissance conjointe de la parentalité adoptive.
🔹 En revanche, si l’enfant est biologique, et que le conjoint souhaite l’adopter, la loi prévoit un transfert complet de l’autorité parentale. Cela signifie que le parent biologique perd ses droits parentaux au profit du parent adoptif. Il n’y a pas de partage de l’autorité entre les deux conjoints, ce qui crée une asymétrie juridique. Cela n’est évidemment pas acceptable par les parents.
Cette distinction, soulignée dans l’article, repose sur les dispositions du Code civil thaïlandais. Elle peut sembler contre-intuitive, surtout dans le contexte d’un mariage légalement reconnu, où l’on s’attendrait à une parentalité partagée, quel que soit le statut initial de l’enfant.
Pour que le mariage pour tous soit pleinement reconnu, les lois sur la nationalité et l’adoption doivent être harmonisées. L’égalité ne doit pas s’arrêter à l’acte de mariage, mais s’étendre à tous les droits qui en découlent.



