
Kittiratt
Tout d’abord, rappelons que c’est le gouverneur de la Banque Centrale qui détient le pouvoir. Le président de la BOT ne peut pas diriger la politique des taux d’intérêt de la banque centrale, mais le conseil d’administration qu’il dirige sélectionne le comité de politique monétaire, composé du gouverneur, de deux gouverneurs adjoints et de quatre experts extérieurs. Le président aura également une certaine influence sur la sélection du prochain gouverneur de la BOT lorsque le président sortant, Sethaput Suthiwartnarueput, achèvera son mandat en septembre 2025.
Un comité, indépendant de la BoT, a choisi le 11 novembre l’ancien vice-premier ministre et ministre des Finances Kittiratt Na Ranong, 66 ans, comme président du conseil d’administration de la banque centrale, malgré les objections de centaines d’universitaires et d’économistes.
Trois personnes étaient en lice pour ce poste. Kittiratt est un fidèle du parti au pouvoir et également critique à l’égard du gouverneur actuel de la banque centrale Sethaput. Kittiratt remplacera l’ancien président, M. Porametee Vimolsiri, dont le mandat a expiré le 11 septembre 2024.
En tant que ministre des Finances de 2012 à 2014, Kittiratt s’est fréquemment opposé au chef de la banque centrale de l’époque et il a soutenu les demandes répétées du gouvernement actuel en faveur d’une réduction des taux pour relancer une économie qui n’a crû que de 1,9 % l’année dernière.
Le choix de Kittiratt pourrait creuser le fossé entre la banque centrale et le gouvernement Pheu Thai. Un gouverneur de la banque centrale, Chatu Mongol Sonakul, a été limogé en 2001 sur ordre du premier ministre Thaksin Shinawatra, influent fondateur de Pheu Thai et père de la Première ministre actuelle, Paetongtarn. Elle a déclaré en mai que l’indépendance de la banque centrale était « un obstacle ».
L’ancienne gouverneure de la Banque de Thaïlande, Tarisa Watanagase, a averti que l’indépendance de l’institution était menacée et que cela pourrait « conduire à un désastre pour l’économie ».
Dans une lettre ouverte, ce week-end, un groupe de plus de 800 économistes, dont quatre anciens gouverneurs de la banque centrale, ont averti que l’ingérence politique pourrait nuire à la stabilité économique à long terme. « Si le président ou les membres du conseil d’administration utilisent leur pouvoir pour servir les intérêts à court terme d’un parti politique, cela aura un impact négatif sur la stabilité économique et pourrait causer des dommages irréversibles », peut-on lire.
L’ancien gouverneur de la BOT, Veerathai Santiprabhob, a déclaré dimanche sur Facebook « Si nous permettons au politique de dominer la banque centrale, cela sapera sa crédibilité et affaiblira toutes les institutions économiques. À l’avenir, nous pourrions voir des projets encore plus populistes et court-termistes pour atteindre des objectifs politiques », a-t-il conclu.
La sélection de Kittiratt s’est déroulée alors que deux groupes d’activistes se sont rassemblés au siège de la Banque de Thaïlande, pour protester contre cette nomination. Le comité de sélection indépendant, présidé par Sathit Limpongpan, a procédé à la sélection lundi après que la réunion de la semaine dernière a été reportée en raison de protestations.
Un groupe d’opposants, dirigé par Phichit Chaimongkhon, a soumis une liste de 51 000 partisans et une lettre adressée au comité de sélection, exigeant la démission du président du comité. Il a menacé de déposer une plainte auprès de la Cour constitutionnelle, remettant en question les normes éthiques du ministre des Finances Pichai Chunhavajira arguant que la situation est comparable à l’affaire qui a valu sa révocation à l’ancien Premier ministre Srettha Thavisin.