
La Thaïlande prévoit d’organiser un référendum national pour décider de l’annulation ou non des protocoles d’accord MOU43 et MOU44, signés avec le Cambodge en 2000 et 2001. Ces textes concernent la délimitation des frontières terrestres et maritimes entre les deux pays. Le Premier ministre Anutin Charnvirakul, favorable à leur suppression, estime qu’ils n’ont pas permis d’éviter les tensions frontalières et souhaite consulter la population avant toute décision.
Le scrutin serait couplé aux élections générales et au référendum constitutionnel prévu pour mars-avril. Les électeurs recevraient quatre bulletins : deux pour les députés, un pour la Constitution, un pour les MOU. Une campagne d’information est annoncée pour préparer les citoyens à ce format inédit.
Mais ce projet suscite de nombreuses critiques. L’ancien vice-ministre des Affaires étrangères, Russ Jalichandra, met en garde contre une annulation précipitée qui, selon lui, profiterait au Cambodge et affaiblirait la position diplomatique de la Thaïlande. Il rappelle que ces accords servent de cadre de négociation et que toute modification des frontières doit passer par le Parlement. Pour lui, les MOU sont des outils stratégiques à préserver.
Rangsiman Rome, député du Parti du Peuple, partage ces inquiétudes. Il souligne la complexité des enjeux liés aux MOU : droit international, cartes historiques, intérêts énergétiques et sécurité. Il recommande une révision des accords plutôt qu’une suppression, et insiste sur la nécessité d’informer correctement les électeurs. Il craint qu’une rupture unilatérale pousse le Cambodge à saisir la Cour internationale de justice.
Du côté cambodgien, la réaction est ferme. Seng Dyna, porte-parole du ministère de la Justice, affirme que le MOU43, enregistré à l’ONU en 2001, équivaut à un traité international et ne peut être annulé unilatéralement. Il précise que le document reste valide tant que ses objectifs ne sont pas atteints. Des révélations indiquent que cet enregistrement s’est fait sans l’approbation du Parlement thaïlandais, et qu’une carte contestée y est annexée.
Se lancer dans cette croisade contre les MoU ravira les nationalistes thaïlandais et l’armée. Ce regain de nationalisme favorisera Anutin pour les élections législatives. Par ailleurs, la campagne référendaire sera biaisée, car personne n’osera s’opposer à ce projet d’annulation d’accord avec le Cambodge, en période de tensions frontalières. Une telle dynamique pourrait exacerber l’animosité contre les Cambodgiens, alimenter les discours hostiles, et compromettre toute tentative de dialogue bilatéral futur. En l’absence de cadre diplomatique clair, le risque d’escalade devient réel — et certains observateurs s’interrogent sur les véritables intentions du pouvoir.