
Singapour et la Malaisie sont des économies matures. La Thaïlande devrait se trouver devant et au niveau de l'Indonésie.
Le Premier ministre Srettha Thavisin tiendra lundi la première réunion spéciale de ses ministres en charge du secteur de l’Économie, alors que les prévisions de croissance du PIB de la Thaïlande pour l’ensemble de l’année ont chuté à 1,5%, le plus bas parmi les dix pays membres de l’ASEAN.
S’adressant hier aux médias thaïlandais à Tokyo, le Premier ministre a déclaré que sans l’industrie du tourisme, qui stimule l’économie thaïlandaise de manière artificielle, la croissance du PIB pourrait être encore plus faible et, pire, l’économie thaïlandaise pourrait entrer en récession.
Il a déclaré qu’il avait demandé à tous les participants à la réunion de lundi de réfléchir, de préparer et de présenter des propositions sur la manière de gérer la situation économique catastrophique. Srettha souhaite qu’ils fassent preuve d’ouverture d’esprit, ajoutant qu’il n’acceptera pas que les participants se contentent d’écouter ses instructions. L’éducation thaïlandaise ne favorise pas l’initiative car une « bonne personne » doit se contenter d’obéir aux instructions, c’est ce que Srettha ne supporte plus.
Une réunion similaire se tiendra désormais chaque semaine, éventuellement en petits groupes, pour évaluer l’état d’avancement, a déclaré le Premier ministre.
Outre la baisse des projections de croissance, il a déclaré qu’il y avait d’autres questions urgentes à discuter, telles que les prêts non remboursés, les cartes de crédit et l’endettement des ménages.
À la question de savoir si le programme de « portefeuille numérique », qui devrait être lancé plus tard cette année, stimulerait l’économie en berne, le Premier ministre a répondu qu’il pouvait aider dans une certaine mesure, mais pas tant que ça.
Pour les économistes, c’est une fausse bonne idée. Du sucre rapide quand l’économie a besoin de sucre lent. Une petite augmentation des bas salaires serait plus stimulante.
Srettha affirme que la réunion n’aura pas pour but de réprimander X ou Y, mais de partager des opinions et des idées.
Le Premier ministre termine une tournée internationale et se trouve actuellement au Japon. Il doit revenir à Bangkok ce samedi et prévoit de visiter Bangkok et Ayutthaya ce dimanche.
Les économistes ne cessent de répéter que la Thaïlande doit résoudre de nombreux problèmes structurels, car le niveau élevé et persistant de l’endettement des ménages pèse sur la croissance..
Le Conseil national de développement économique et social (NESDC) ne dit pas autre chose quand il affirme : « L’économie thaïlandaise pourrait voir une croissance plus faible que prévu à cause de : (1) les niveaux toujours élevés d’endettement des ménages et des entreprises ; (2) le risque d’inondation sur la production agricole ; et (3) le marché financier mondial incertain et volatil ».
Les dettes des ménages constituent un problème majeur et le gouvernement tente de trouver des moyens de résoudre ce problème, notamment en essayant de baisser les taux d’intérêt. Il a appelé à la fin du mois dernier les principales banques commerciales à rechercher des moyens de réduire les taux d’intérêt appliqués à cette catégorie d’emprunteurs. La plupart des banques commerciales s’y sont conformées et ont abaissé les taux de 0,25 % pour une période de 6 mois.
Mais avec des dettes des ménages atteignant près de 90 % du PIB, le NESDC et les économistes affirment que la plupart des ménages gagneraient à peine assez pour rembourser les intérêts de leurs dettes et ne seraient pas en mesure de payer le principal. Selon les économistes, ce problème freine la croissance.
« Selon le Fonds monétaire international (FMI), le ratio dette des ménages thaïlandais/PIB, à 86,9 %, est le 2e le plus élevé de la région après la Corée (en 2022) et bien au-dessus de ses pairs de l’ASEAN : 66,9 % en Malaisie, 48,6 % à Singapour et 16,2 % en Indonésie. L’accumulation de la dette s’est accélérée après les inondations massives de 2011 », a récemment déclaré Charnon Boonnuch, économiste chez Nomura.
Charnon ajoute que « les contraintes structurelles – détérioration de la démographie, baisse de la productivité du travail (due au manque de formation professionnelle), dette élevée des ménages, mauvaise gouvernance, faibles investissements, manque d’innovation, baisse de la compétitivité et rétrécissement de l’espace politique – pèsent sur le pays. » . Voilà les 12 travaux de Srettha.
Mais tous les économistes ne sont pas pessimistes. Methas Rattanasorn, de Tisco Securities, affirme qu’il n’a pas encore revu à la baisse les prévisions de croissance du PIB pour 2024.
« Nous confirmons notre prévision de croissance du PIB de 3 % en 2024, car nous sommes convaincus que l’économie thaïlandaise a déjà atteint son point bas et devrait rebondir au deuxième trimestre », a-t-il déclaré. Ajoutant que les facteurs négatifs affectant la croissance économique s’atténuent. Mais il a poursuivi en avertissant que le manque de clarté des projets d’investissement public et le risque de troubles politiques pourraient nuire au décaissement des budgets publics.
Malgré la hausse des prix du riz, du caoutchouc ou encore du sucre au cours des derniers mois, la production agricole s’est contractée à -3,5% sur un an (vs -0,6% précédemment).
Le secteur non agricole a augmenté de 2% sur un an, principalement dans les services à + 3,6%. Ceci grâce à la croissance de l’hébergement et de la restauration de 11,8% sur un an, liée à la hausse du nombre de touristes. Mais c’est ce qui s’appelle mettre tous ses œufs dans le même panier.