Un simple tir de fusil pourrait-il rallumer l’un des conflits les plus absurdes d’Asie du Sud-Est ? Le 23 septembre, quatre soldats cambodgiens ont ouvert le feu près de la frontière thaïlandaise, dans la province de Sisaket. Trois balles ont été tirées depuis Phu Phee, à proximité immédiate de la clôture de barbelés séparant les deux pays. Côté thaïlandais, on parle de provocation délibérée. Côté cambodgien, on évoque deux tirs « involontaires » et « hors zone ». Une version corrigée après coup, qui n’a pas convaincu Bangkok.
Pas de blessés, pas de dégâts, mais une tension qui grimpe. Les forces thaïlandaises n’ont pas riposté, mais ont immédiatement renforcé leur présence. Des drones ont été repérés dans la zone de Sam Tae, et les postes d’observation restent en alerte maximale. Le général Songwit Nunpakdee a inspecté les troupes sur la ligne de front, notamment autour du temple de Ta Kwai et de la colline de Phu Makheua. Des unités spéciales, tireurs d’élite et commandos du renseignement ont été déployés.
En face, l’armée cambodgienne aurait commencé à dissimuler des armes à feu dans des points stratégiques, selon les autorités thaïlandaises. À Sa Kaeo, des troubles ont été signalés. Le climat est électrique.
L’armée thaïlandaise affirme, sans preuve, que son tracé de la frontière, à Sa Kéo, a été entériné par le Cambodge, jadis. Le Cambodge affirme, sans preuve, qu’il n’en est rien. En l’absence « d’adultes dans la salle », seule une médiation étrangère peut régler le conflit.
Dans ce contexte, le Premier ministre thaïlandais Anutin Charnvirakul a durci le ton. Lors d’un meeting électoral à Si Sa Ket, il a affirmé que toute réouverture des postes-frontières dépendrait de l’acceptation par Phnom Penh des conditions thaïlandaises. « Aucune négociation ne se fera sous pression », a-t-il martelé, confiant à l’armée le plein pouvoir sur les décisions opérationnelles.
Par ailleurs, le président du Sénat cambodgien, Hun Sen, a affirmé le 23 septembre que son pays ne supplierait pas la Thaïlande de rouvrir la frontière, même si celle-ci restait fermée pendant cent ans. Il a précisé que le Cambodge ne prendrait jamais l’initiative de négocier, mais qu’il rouvrirait dans les cinq heures suivant une décision thaïlandaise.
La « guerre la plus bête du monde » n’a pas encore repris. Mais elle n’a jamais été aussi proche.
