
La prochaine élection en Thaïlande s’annonce comme un affrontement direct entre le parti au pouvoir, le Bhumjaithai (BJT), dirigé par Anutin Charnvirakul, et le People’s Party (PP), conduit par Natthaphong Ruengpanyawut. Deux visions politiques s’opposent : celle des réseaux traditionnels enracinés dans les campagnes et celle d’une génération urbaine, plus jeune et tournée vers l’innovation.
Deux mondes politiques
Selon Phichai Ratnatilaka Na Bhuket, politologue à l’université Nida, le PP bénéficie d’un avantage net dans les zones urbaines grâce à une approche moderne et des politiques structurées autour du numérique, du bien‑être et de la réforme. Le BJT, lui, reste fidèle à son modèle de « grandes maisons » : familles influentes, réseaux bureaucratiques et programmes populistes comme le co‑paiement Khon La Khrueng Plus. Mais les inondations dans le Sud ont fragilisé son image et pourraient réduire son influence rurale.
Phichai souligne que deux électorats coexistent : une classe moyenne urbaine attentive aux visions de long terme, et un électorat rural attaché aux liens personnels et aux bénéfices immédiats. Le PP doit encore convaincre les campagnes, tandis que le BJT cherche à séduire les villes.
Les candidats au poste de Premier ministre
Outre les deux leaders bien connus :
Le PP mise sur des figures nouvelles. Sirikanya Tansakun, femme de la nouvelle génération, jouit déjà d’une forte popularité, notamment chez les 35‑55 ans. Veerayooth Kanchoochat, expert en ingénierie et économie, apporte une crédibilité technique.
Le BJT présente Ekniti Nitithanprapas, ministre des Finances expérimenté, mais perçu comme trop bureaucratique, et Suphajee Suthumpun, issue du monde des affaires, jugée moins engagée politiquement. Pour Phichai, le PP sort renforcé de cette comparaison.
Stratégies de terrain
Le PP déploie des campagnes horizontales : bénévoles, jeunes, outils numériques. Une application interne permet de cartographier les électeurs et d’atteindre directement les 400 circonscriptions. Le parti insiste aussi sur sa ligne « zéro corruption ».
Le BJT, de son côté, met en avant ses résultats concrets : prix du riz en hausse, programmes de soutien aux agriculteurs, proximité avec les communautés locales. Le député Sanong Thepaksornnarong reconnaît toutefois la difficulté en milieu urbain et insiste sur la nécessité « d’éduquer » les jeunes électeurs.
Perspectives
Le parti Bhumjai Thai espère obtenir entre 130 et 140 sièges, mais la mauvaise gestion des inondations à Hat Yai et dans le sud a freiné ses ambitions. Le Parti du Peuple vise environ 150 sièges, tandis que le Pheu Thai en attend une centaine. Quant au Kla Tham, dirigé par Thammanat Prompao – un ancien trafiquant de drogue condamné en Australie –, il devrait compter autour de 30 députés. Le Parti démocrate pourrait atteindre la limite importante des 25 sièges.
Les inondations et l’usure du pouvoir pèsent sur Anutin, tandis que le PP capitalise sur son image de renouveau.
Le scrutin s’annonce donc comme un choc entre deux mondes : l’ancien système de clientélisme rural, voire d’une certaine féodalité, et une nouvelle génération urbaine, portée par des politiques plus modernes et une volonté affichée de réforme.



