
Anutin arrive au Laos
Le Premier ministre thaïlandais Anutin Charnvirakul est vivement critiqué par les médias et l’opposition pour son manque de réactivité face à la prolifération des centres d’arnaque opérant depuis le Cambodge. Alors que les autorités américaines et britanniques ont saisi pour plus de 15 milliards de dollars d’actifs liés à ces réseaux criminels, et que la Corée du Sud a émis des avertissements à ses citoyens concernant certaines zones cambodgiennes, la Thaïlande semble rester en retrait.
Cette inertie a suscité une vague d’indignation dans la presse thaïlandaise, d’autant plus que plusieurs ressortissants sud-coréens ont récemment perdu la vie dans des circonstances liées à ces réseaux. Lors d’un appel téléphonique avec le président sud-coréen Lee Jae-myung, en marge d’une visite officielle au Laos, Anutin a exprimé ses condoléances et assuré que la Thaïlande faisait pression sur le Cambodge pour intensifier la lutte contre les escroqueries et la traite humaine. Il a également sollicité le soutien de Séoul pour inciter Phnom Penh à agir, tout en réaffirmant la volonté de Bangkok d’aider les victimes sud-coréennes.
À ce sujet, la Corée du Sud prévoit de proposer un cadre de coopération multilatérale avec l’ASEAN lors du sommet régional prévu en Malaisie fin octobre, afin de lutter contre les crimes organisés au Cambodge, notamment les arnaques liées à de fausses offres d’emploi. Selon Wi Sung-lac, directeur du Bureau national de sécurité présidentielle, l’objectif est de mettre en place des enquêtes conjointes avec les autorités policières de l’ASEAN.
Face à l’ampleur des escroqueries en ligne en Asie du Sud-Est — impliquant près de 200 000 personnes — Séoul souhaite également porter le sujet devant des instances internationales comme l’ONU et l’OCDE. Cette initiative intervient alors que 60 ressortissants sud-coréens sont actuellement détenus au Cambodge dans des affaires d’enlèvement liées à ces réseaux. Une délégation coréenne, envoyée en urgence à Phnom Penh sur ordre du président Lee Jae-myung, a rencontré le Premier ministre Hun Manet pour renforcer la coopération bilatérale.
En Thaïlande et, malgré ces déclarations diplomatiques, les critiques persistent. L’opposition accuse le gouvernement de ne pas prendre de mesures concrètes, notamment en matière de coopération régionale ou de protection des citoyens thaïlandais potentiellement impliqués ou victimes. Le contraste avec l’activisme sud-coréen et les saisies occidentales alimente le sentiment d’un double discours.
Dans ce contexte tendu, des rumeurs circulent sur l’implication présumée du vice-Premier ministre Thammanat Prompao (du parti Klatham) dans un réseau de centres d’appel frauduleux. Thammant aurait passé 5 ans dans les geôles australiennes pour trafic de drogue, même si les deux affaires ne sont pas liées.
Pai Lik, député du parti Klatham (allié du Bhumjaithai), a vigoureusement défendu Thammanat sur Facebook, dénonçant une manœuvre politique et affirmant être prêt à quitter la vie publique si des preuves venaient à l’incriminer.
Entre pressions internationales, tensions internes et soupçons de corruption, le gouvernement Anutin se retrouve dans une position délicate. L’opinion publique attend désormais des actes concrets pour restaurer la confiance et affirmer la position de la Thaïlande dans la lutte contre la criminalité transfrontalière.
On se souvient que les centres d’appel de Myawaddy, ville frontière birmane, n’avaient été combattus par la Thaïlande qu’après des pressions significatives de la part de la Chine. L’affaire s’était déroulée sous le gouvernement Pheu Thai dont le ministre de l’Intérieur n’était autre qu’Anutin. L’implication de hauts fonctionnaires en place à Mae Sot avait été plus que suspectée et avait entraîné leur mutation.