Deux policiers du poste de police d’Aranyaprathet, dans la province de Sa Kaeo, ont torturé un homme alcoolique mais innocent pour qu’il avoue le meurtre de sa femme, selon une enquête préliminaire menée par la police royale thaïlandaise.
La femme a en fait été tuée par un groupe d’adolescents âgés de 13 à 16 ans, a indiqué la police. Deux des agresseurs seraient des fils de policiers.
Le général Surachate Hakparn, chef adjoint de la police nationale, a déclaré que Panya Khongsaenkham, le mari de la victime, âgé de 54 ans, avait identifié le policier qui l’avait forcé à se déshabiller dans une pièce froide et climatisée et celui qui lui avait mis un sac poubelle noir sur la tête.
Ces actes de torture visaient à faire pression sur M. Panya pour qu’il avoue le meurtre de sa femme, Buaphan Tansu, 47 ans, a déclaré le général Pol Surachate.
M. Panya, qui se trouve actuellement dans un centre gouvernemental pour personnes vulnérables, a vu des photos de chaque agent du commissariat d’Aranyaprathet. En sécurité dans ce centre, on a pu lui demander d’identifier les policiers suspects, a expliqué Surachate.
On ne sait pas si Panya sera protégé à l’avenir car on devine que la police d’Aran dans son ensemble sera en colère contre lui.
Arrêté peu après la découverte du corps de la victime, le 12 janvier, M. Panya avait avoué le meurtre de sa femme. Cependant, une vidéo de sécurité a montré par la suite que cinq jeunes étaient responsables de sa mort.
Des extraits audio de conversations impliquant l’enquêteur principal du commissariat d’Aranyaprathet et ses collègues indiquent également que les agents savaient pertinemment qu’ils avaient arrêté « la mauvaise personne » .
Panya n’a été libéré que 48 heures plus tard quand un journaliste a montré la vidéo incriminant les enfants sur la chaîne 8.
L’enquête a déterminé que les deux policiers qui auraient torturé M. Panya ont violé le code disciplinaire de la police et l’article 157 du Code pénal, a déclaré le lieutenant-général Somprasong Yentuam, chef de la police provinciale.
Une fois l’enquête terminée, un comité remettra toutes les preuves obtenues à la police provinciale de Sa Kaeo et déterminera si les policiers ont enfreint la loi anti-torture par les fonctionnaires de 2022, a déclaré Somprasong.
La Commission nationale des droits de l’homme a déclaré dans un communiqué qu’elle demanderait au bureau du procureur général d’envisager d’engager des poursuites judiciaires contre les deux policiers en vertu de cette loi anti-torture.
On comprend que des poursuites contre les deux policiers tortionnaires ne sont pas acquises et ne restent actuellement qu’à l’état d’éventuel projet futur.
Une source proche de l’enquête a identifié les deux officiers délinquants et de haut rang comme les enquêteurs Phisek Phuangmalipradap, et Phichit Watthano.
Cette histoire a déclenché un tollé général dans le pays car les Thaïlandais qui détestaient déjà leur police demandent une réforme du rôle de la police en matière d’application de la loi et veulent la justice pour tous.
Prayut avait promis cette réforme après son coup d’état de 2014 mais s’est rendu compte qu’il s’attaquait à des entités plus fortes que lui. Il n’a rien fait.
Certains Thaïlandais ne sont pas persuadé qu’il faille modifier la loi concernant les mineurs. Dans le cas présent, on peut se demander si les délinquants se sont conduits ainsi parce que ce sont des adolescents ou bien si la raison est qu’ils sont des enfants de policiers donc qu’ils se sentaient intouchables.
« Je dois admettre que la police a commis une erreur », a déclaré le chef de la police nationale, le général Pol Torsak Sukvimol prompt à rejeter tous les malheurs de la Thailande sur sa jeunesse et non sur sa police.
En ce qui concerne le droit pénal des mineurs, a-t-il déclaré, la police étudie la possibilité de modifier la loi afin que les jeunes qui commettent des délits graves soient confrontés à des sanctions plus sévères.
Les modifications juridiques concernant le droit pénal des mineurs dans des pays comme la Chine, le Japon et l’Europe sont prises en compte dans cette étude, a-t-il indiqué, ajoutant que les résultats sont attendus d’ici la fin du mois. Ils seront soumis au Premier ministre Srettha Thavisin.
Parallèlement, une autre étude est en cours pour connaître le taux de récidive des jeunes délinquants après leur sortie des centres de détention, a-t-il précisé. « Nous ne pouvons toujours pas dire quel devrait être le nouvel âge limite (il évoquait 12 ans), car nous devons être prudents sur cette question », a-t-il déclaré.
Le professeur Krisanaphong Poothakool, département de criminologie, université de Rangsit, a quant à lui déclaré que la police devait dissiper tous les doutes soulevés sur l’affaire du bouc émissaire d’Aran.
Les policiers impliqués doivent être sévèrement punis, à la fois pour dissuader de désigner des boucs émissaires et pour restaurer la confiance du public, a-t-il déclaré. Il a également soutenu une révision du droit pénal concernant les mineurs, affirmant que le Japon, a déjà abaissé l’âge limite de 16 à 14 ans.
L’amendement juridique du Japon fait suite au meurtre horrible de trois enfants par un jeune de 15 ans, a-t-il déclaré. Les parents de jeunes délinquants reconnus coupables de terrorisme aux États-Unis sont désormais tenus responsables de la mauvaise conduite de leur enfant, a-t-il ajouté.
Évidemment, si les enfants de policiers et leurs parents restent impunis, abaisser l’age de la responsabilité pénale pour les autres n’a pas de sens.
La loi devrait également être amendée pour imposer davantage de responsabilité juridique aux parents d’un jeune délinquant, a déclaré le général Pol Winai Thongsong, membre de la commission de la police.
Même si les jeunes ont tendance à mûrir tôt, leurs parents ne peuvent pas nier leur responsabilité. Ils devraient être poursuivis parallèlement à leurs enfants, a-t-il déclaré.
Nutthawut Buaprathum, député du Parti Move Forward (MFP), estime en revanche que le droit pénal thaïlandais pour les mineurs est suffisant pour le moment et ne nécessite aucun changement. Il y a deux ans, la loi a déjà été modifiée
Au lieu de faire pression pour abaisser l’âge limite pour être poursuivi, le député a déclaré qu’il préférerait encourager davantage de mesures préventives qui, selon lui, seraient plus efficaces pour réduire le taux de criminalité juvénile.
L’absence des enfants à l’école, par exemple, doit être rapidement détectée comme un signe auquel il faut remédier avant qu’elle ne se transforme en un problème plus grave, a-t-il déclaré.
De nombreux autres pays ont conclu que poursuivre plus durement les jeunes délinquants n’est pas la solution idéale, a déclaré M. Nutthawut.
Forcer un suspect à avouer un crime est un comportement du passé qui ne devrait plus jamais se produire, a déclaré le général Winai, ajoutant que la police devrait se concentrer sur la recherche de preuves suffisamment solides pour amener un suspect à admettre son crime.
En effet, même si des aveux ont été obtenus au cours de l’enquête policière, un suspect peut toujours revenir sur ses aveux devant le tribunal si les enquêteurs ne disposent pas de preuves suffisantes pour les étayer, a-t-il déclaré.
Si la loi anti-torture avait été respectée au commissariat d’Aranyaprathet, ce cas ne se serait pas produit, a déclaré Angkhana Neelaphaijit, du Groupe de travail des Nations Unies sur les disparitions forcées.
Selon la loi, la police d’Aranyaprathet était censée porter une caméra corporelle et enregistrer l’interrogatoire de M. Panya, a-t-elle expliqué.
La loi stipule que les autorités administratives, les procureurs, la police et les responsables du Département des enquêtes spéciales (DSI) sont autorisés à examiner une plainte concernant un traitement inapproprié envers un suspect. « Nous attendrons de voir comment cette affaire sera tranchée. Nous disposons désormais d’une nouvelle loi conçue pour mieux protéger la sécurité et les droits des suspects », a-t-elle déclaré. Personne ne sait si elle sera appliquée ici.
M. Nutthawut (MF) suggère trois piste :
des progrès en technologie médico-légales (pour éviter les erreurs judiciaires),
davantage d’avocats publics au niveau provincial pour protéger les suspects (si la police veut faire avouer à tous prix, une bonne technologie est inutile)
et soutien aux médias pour équilibrer l’autorité de la police (si la chaîne 8 n’avait pas diffusé la vidéo trahissant les fils de flic, Panya serait toujours en prison)..
