
La fermeture de l’école privée Patai Udom Suksa [située sur Vibhawadee, près de l’aéroport de Don Mueang], après 55 ans d’existence, a marqué les esprits en Thaïlande. Ce n’est plus un cas isolé : de plus en plus d’établissements ferment leurs portes, révélant une crise profonde du système éducatif. Les causes sont multiples : baisse drastique du taux de natalité, difficultés économiques des familles et charges financières trop lourdes pour les écoles privées.
Selon Supaset Khanakul, président de l’Association pour la promotion de l’éducation privée, environ 30 à 40 écoles ferment chaque année, soit près de 1 % du total. Mais si ce chiffre grimpe à 80 ou 90, une réforme urgente deviendra inévitable. Les écoles privées, contrairement aux établissements publics, doivent assumer seules leurs frais de fonctionnement et de personnel. Quand les inscriptions chutent, les revenus s’effondrent immédiatement, alors que les coûts fixes restent.
La pandémie a aggravé la situation. Beaucoup d’écoles avaient investi massivement dans des programmes bilingues, des enseignants étrangers et des infrastructures modernes, espérant améliorer leur niveau pour les évaluations internationales. Mais les retours financiers sont restés faibles, et les nouvelles générations de propriétaires hésitent à poursuivre des affaires familiales jugées peu rentables.
Usa Somboon, de l’Association des écoles internationales, souligne que les familles privilégient désormais l’accessibilité financière plutôt que le prestige. Elle rappelle que la réussite d’un enfant dépend surtout du soutien familial et de la motivation, et non uniquement du nom de l’école. Dans certaines zones rurales, des enseignants et directeurs engagés parviennent encore à créer des environnements stimulants malgré des moyens limités.
Le secteur public n’est pas épargné. La ministre de l’Éducation, Narumon Pinyosinwat, reconnaît que la baisse des naissances fragilise l’efficacité des petites écoles rurales. Sur plus de 29 000 établissements, 346 n’ont plus aucun élève inscrit. Pourtant, fermer une école publique reste délicat : les communautés locales considèrent ces institutions comme un bien commun et s’opposent souvent aux regroupements.
Face à la fermeture de Patai Udom Suksa, des écoles voisines comme Prangthip Kindergarten accueillent déjà les élèves transférés. Cet établissement mise sur des classes réduites, avec un enseignant anglophone et un assistant thaïlandais pour 25 enfants, afin de maintenir la qualité tout en restant financièrement viable. Mais la réglementation interdit aux écoles d’exclure les élèves qui ne paient pas leurs frais, ce qui accentue les déficits.
La crise démographique et l’arrivée de nouvelles technologies éducatives accentuent les pressions. Moins d’élèves signifient moins de revenus, tandis que l’intégration de l’intelligence artificielle exige des investissements coûteux. Les écoles incapables de s’adapter risquent de disparaître rapidement.
Pour les experts, la conclusion est claire : les fermetures ne sont plus des accidents isolés, mais les symptômes d’une crise systémique. L’avenir de l’éducation en Thaïlande dépendra de la capacité des écoles à innover, à gérer leurs finances avec prudence et à bénéficier d’un soutien gouvernemental élargi. Sans cela, le pays pourrait voir son réseau scolaire se réduire drastiquement dans les années à venir.



