
Les commandants militaires thaïlandais et cambodgiens ont convenu mardi d’un cessez-le-feu temporaire, mettant en pause les tirs et les mouvements de troupes le long de la frontière jusqu’à lundi prochain. Cette accalmie vise à préparer le terrain avant la rencontre des ministres de la Défense des deux pays à Phnom Penh.
À la frontière, trois réunions distinctes ont permis aux responsables régionaux des deux armées d’établir des mesures de confiance. À Khlong Luek, dans la province de Sa Kaeo, le général Amarit Boonsuya a rencontré son homologue cambodgien en charge de la 5e région militaire. Plus à l’est, à Chong Chom (Surin), le lieutenant-général Boonsin Pladklang a échangé avec le chef de la 4e région militaire du Cambodge. Enfin, une réunion en ligne a réuni les autorités militaires de Chanthaburi et Trat avec leurs homologues cambodgiens.
Outre la suspension des opérations, les deux camps ont convenu d’ouvrir des canaux de communication d’urgence, dans l’espoir d’éviter tout incident imprévu. Cette démarche s’inscrit dans la continuité des discussions entre les Premiers ministres des deux pays, tenues lundi à Putrajaya, en Malaisie.
Les pourparlers militaires visent à établir un cadre commun post-trêve autour de ces axes :
– cessation des tirs,
– interdiction de cibler des civils,
– arrêt des mouvements de troupes, et
– gestion des blessés, défunts et détenus.
Le prochain rendez-vous diplomatique est prévu lundi à Phnom Penh, lors de la réunion du Comité général des frontières. Le général Tea Seiha, ministre cambodgien de la Défense, en assurera la présidence, tandis que le général Natthapon Nakpanich représentera la Thaïlande, en l’absence de titulaire officiel à ce poste.
Le gouvernement thaïlandais a confirmé que ses forces militaires contrôlaient désormais 11 sites clés le long de la frontière avec le Cambodge : Phu Makheua, Chong An Ma, Prasat Ta Muean Thom, Prasat Ta Kwai, Chong Bok, Don Tual, Sattasom, Chong Chom, Chong Sai Takoo, Preah Vihear et Playao.
Lors d’une déclaration officielle au siège du gouvernement, le contre-amiral Surasan Kongsiri et la représentante du ministère des Affaires étrangères, Maratee Nalita Andamo, ont dénoncé une série de violations cambodgiennes de l’accord de cessez-le-feu. Bien que la Thaïlande ait respecté l’arrêt des tirs dès minuit, des frappes cambodgiennes auraient visé le territoire thaïlandais dès les premières heures du jour, compromettant la confiance mutuelle.
Bangkok affirme avoir riposté dans le cadre du droit à la légitime défense, tout en rejetant toute intention d’invasion territoriale. Le gouvernement accuse également Phnom Penh d’utiliser des sites antiques comme boucliers militaires, en infraction avec les conventions internationales de l’UNESCO. L’armée cambodgienne nie en bloc et souhaite organiser une visite du front avec les attachés militaires étrangers en poste à Phnom Penh.
Le bilan humain est lourd côté thaïlandais : 188 729 personnes ont été évacuées, et 53 civils ont été touchés (15 morts, 12 blessés graves, 13 modérés, 13 légers). Quatorze blessés restent hospitalisés. Au moins 20 établissements médicaux sont affectés, dont 13 totalement fermés, et 175 centres de santé de proximité impactés.
Quatre soldats thaïlandais ont été tués lundi dans des affrontements, portant le bilan total à 15 morts depuis la reprise des hostilités jeudi dernier.
Côté cambodgien, si l’on peut espérer un nombre de civils tués moins important, il ne fait pas de doute que le nombre de soldats morts est plus élevé, y compris des officiers supérieurs.
Mme Maratee a par ailleurs souligné l’importance de la cybersécurité, face à une montée des attaques en ligne et à la diffusion de fausses informations. Le public est invité à redoubler de vigilance et à signaler tout incident au ministère de l’Économie numérique.
À ce jour, la guerre lancée par Hun Sen tourne au désastre pour le Cambodge : le pays a perdu le contrôle de tous les temples situés sur son territoire selon les cartes de 1907. Certes, l’occupation par l’armée thaïlandaise de ces onze sites ne vaut pas reconnaissance territoriale définitive. Mais le ressentiment cambodgien envers la Thaïlande se renforce, alimenté par chaque revers. Cette guerre, souvent qualifiée de « plus bête du monde », mérite peut-être désormais un autre titre : celui de « la plus longue », tant une issue semble hors de portée.