
Les paysans qui cultivent du riz depuis des générations sur leurs propres terres se préparent à un bouleversement majeur. Face à la chute des prix du riz, le gouvernement thaïlandais veut encourager une reconversion vers d’autres cultures. Le ministère de l’Agriculture et des Coopératives soumet aujourd’hui ses lignes directrices au Comité national de la politique rizicole, présidé par le Premier ministre Anutin Charnvirakul. Objectif : établir des zones pilotes couvrant un million de rai pour tester la diversification.
Concrètement, les autorités identifient les zones jugées peu adaptées à la riziculture et incitent les agriculteurs à se tourner vers le maïs ou les légumineuses. Une manière de répondre durablement à la crise des prix. Selon la FAO, l’indice mondial du riz a reculé de 2,5 % en octobre, conséquence d’une concurrence accrue et du lancement des récoltes dans l’hémisphère nord. Plus largement, les prix alimentaires mondiaux ont baissé de 1,6 % sur la période, reflétant des stocks abondants.
Cette crise agricole s’inscrit dans un contexte économique morose. Le Conseil national de développement économique et social (NESDC) prévoit une croissance du PIB limitée à 0,6 % au quatrième trimestre, contre 1,2 % au trimestre précédent. Sur neuf mois, la croissance atteint 2,4 %, et l’année devrait se conclure à seulement 2 %. Le vice‑Premier ministre et ministre des Finances, Ekniti Nitithanprapas, conteste ces chiffres et table sur 1,1 % grâce aux mesures de relance, notamment le programme “Khon La Khrueng Plus 1.5”. Il annonce ce chiffre comme une victoire, c’est en réalité un grave revers par rapport aux pays comparables.
Le gouvernement tente aussi de rassurer sur la discipline budgétaire. Le ministère des Finances propose de ramener le déficit public sous les 3 % du PIB d’ici 2029, contre une projection de 4,4 % en 2026. Une réunion conjointe avec la Banque de Thaïlande et les principales agences économiques doit finaliser le cadre budgétaire 2027.
Mais les signaux restent préoccupants : contraction de l’industrie manufacturière, chute des recettes touristiques, dette des ménages supérieure à 80 % du PIB. Pour Somkiat Tangkitvanich, président du TDRI, la Thaïlande est enfermée dans une “croissance lente chronique” depuis trois décennies. Le pays, qui visait le statut de revenu élevé d’ici 2036, risque de voir le Vietnam le dépasser en revenu par habitant dès 2030, c’est-à-dire demain.

Selon les dernières données de croissance trimestrielle, le PIB vietnamien progresse de 7,2 % sur chacun des trois premiers trimestres de 2025, confirmant sa position de locomotive régionale. À l’inverse, la Thaïlande, avec une croissance qui chute à 1,2 % au troisième trimestre, se rapproche dangereusement du niveau du Japon, souvent cité comme exemple de stagnation chronique.
Ce contraste illustre une dynamique de fond : le Vietnam, porté par ses exportations, ses investissements étrangers et une politique industrielle agressive, continue de grimper dans les classements asiatiques. La Thaïlande, elle, reste engluée dans une croissance molle, minée par une dette privée élevée, une industrie en perte de vitesse et une incertitude politique persistante.
Le Japon, malgré un léger rebond en début d’année, retombe à 1,1 % de croissance au T3, confirmant son statut de puissance économique vieillissante. Voir la Thaïlande évoluer dans cette même zone de faiblesse inquiète les analystes : sans réforme structurelle, le royaume pourrait plonger.


