
Alors que la Thaïlande s’apprête à devenir une société « super-âgée » d’ici 2034, avec plus de 28 % de sa population âgée de 60 ans et plus, le relèvement de l’âge de départ à la retraite de 60 à 65 ans apparaît non pas comme une contrainte, mais comme une véritable bénédiction pour des millions de travailleurs.
Le Premier ministre Anutin Charnvirakul a récemment proposé cette réforme pour les fonctionnaires, suscitant un débat national. Pourtant, les données sont claires : avec plus de 40 000 centenaires déjà recensés et une espérance de vie en hausse, maintenir une retraite à 60 ans reviendrait à laisser des millions de personnes sans revenu stable pendant quatre décennies. Or, les pensions publiques plafonnent à moins de 1 000 bahts par mois — insuffisant pour vivre dignement. Les pensions des fonctionnaires sont plus généreuses sans permettre de vivre confortablement.
Selon Nonarit Bisonyabut (TDRI), les seniors génèrent déjà 640 milliards de bahts de revenus annuels, un chiffre qui atteindra 880 milliards d’ici 2033. En prolongeant leur activité professionnelle de cinq ans, ces travailleurs peuvent continuer à percevoir un salaire décent, éviter de puiser prématurément dans leurs économies, et contribuer à l’économie dite « argentée », en plein essor.
La génération X, née entre 1965 et 1980, est aujourd’hui la plus nombreuse en Thaïlande. Face à une natalité en chute libre et à une pénurie de main-d’œuvre annoncée, ces travailleurs expérimentés représentent une ressource précieuse. Nombre d’entre eux, bien que tentés par une retraite anticipée, seront appelés à réintégrer le marché du travail dans les années à venir.
Pour que cette transition soit un succès, les experts appellent à des réformes structurelles : suppression des discriminations liées à l’âge, adaptation des lieux de travail, formations ciblées et incitations à l’emploi prolongé. Le modèle singapourien, avec sa politique de « réemploi » et ses fonds dédiés à la reconversion des seniors, est cité en exemple.
En somme, repousser l’âge de la retraite à 65 ans, loin d’être une punition, permettrait à des millions de Thaïlandais de maintenir leur autonomie financière, de valoriser leur expérience et de contribuer activement à une société vieillissante. Encore faut-il que les conditions de travail suivent, et que l’État accompagne cette transition avec des politiques inclusives et transparentes.



