
Les étudiants de Thammasat font le geste (interdit) aux 3 doigts après la dissolution du MFP
Un sondage empirique et qui n’a rien de rigoureux indique que 84 % des personnes interrogées voteraient pour le Parti Populaire nouvellement formé si des élections avaient lieu demain. Ce soutien massif fait suite à la dissolution du parti réformiste Move Forward par la Cour constitutionnelle.
Le sondage, qui a recueilli les réponses d’environ 51 000 personnes via la chaîne YouTube de Matichon, illustre l’engouement de l’opinion publique pour le Parti populaire (PP). Il est probable qu’un sondage effectué par un institut plus professionnel aurait donné des chiffres moins impressionnants mais il est envisageable que le le PP soit majoritaire dans le pays. Cela prouverait que les observateurs avaient raison : plus le régime s’acharne sur les progressistes plus ceux-ci progressent. Les attaques aussi brouillonnes que systématiques du régime contre la volonté du peuple sont contre-productives.
Seulement 9 % des personnes interrogées ont indiqué soutenir le parti Pheu Thai au pouvoir, dirigé par Thaksin Shinawatra, le leader de facto. Bhumjaithai, le deuxième partenaire de la coalition n’obtient que 2 % des voix virtuelles. Ce n’est pas un problème pour lui car il « tient » le Sénat grâce à une stratégie maline et il collabore avec le régime.
C’est plus embêtant pour Pheu Thai et Thaksin qui se targue du soutient populaire. L’ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra a justement déclaré mardi aux députés du Pheu Thai qu’il s’attend à ce que le parti obtienne plus de 200 sièges lors des prochaines élections en 2027. Il a souligné que pour atteindre cet objectif, il fallait s’attaquer aux problèmes économiques et réduire les inégalités. Si le gouvernement améliore la situation au cours des trois prochaines années, il sera possible d’atteindre l’objectif de 200 sièges, a-t-il ajouté sans expliquer pourquoi rien n’a été fait dans ce domaine depuis un an. La manne de 10000 bahts n’a pas vocation à réduire les inégalités mais à booster ponctuellement l’économie.
Le parti Populaire affirme avoir vu 19 000 personnes s’inscrire en une seule journée, ce qui permettra d’atteindre l’objectif de 100 000 membres en un mois.
De son côté, Puangthong Pawakapan, politologue à l’Université Chulalongkorn, a critiqué la Cour constitutionnelle pour sa politique de deux poids, deux mesures. Elle rappelle que les coups d’État militaires passés, comme ceux de 2006 et 2014 (Sonthi Boonyaratkalin et Prayut Chan-o-cha), constituaient clairement des crimes constitutionnels, mais sont restés impunis. En revanche, Move Forward a été dissous sans raison et la population l’a bien compris.
Une cours constitutionnelle devenue l’ennemie publique numéro 1 dans le royaume. Des étudiants des universités Thammasat et Chulalongkorn ont lancé des campagnes ciblant deux juges de la Cour constitutionnelle qui sont également conférenciers invités dans leurs institutions.
Le Conseil étudiant de l’Université Thammasat (Rangsit) souhaite qu’Udom Rathamarit, juge de la Cour constitutionnelle, soit démis de ses fonctions de conférencier spécial à l’Université. Les étudiants considère que ce juge n’a plus rien à voir avec la justice, qu’il enseigne pourtant, en ayant voté la dissolution du parti Move Forward.
Même chose à l’Université de Chulalongkorn où un autre membre de la CC Jiraniti Havanon veut venir expliquer la décision controversée.
Les étudiants pensent comme les experts que la dissolution des partis doit être une mesure de dernier recours et non une solution de facilité qui permet au régime d’éliminer les partis qui ne sont pas alignés. Les étudiants considèrent que la décision de la CC viole les principes de l’État de droit et que l’intervention de Jiraniti nuira aux étudiants en droit de Chulalongkorn.
Mais les royalistes contre-attaquent en portant plainte sur divers sujets sachant que la « justice » les écoutera avec une oreille bienveillante.
Les royalistes ont porté plainte pour lèse-majesté contre Warner Music Thaïland qui a publié la photo falsifiée des neufs juges de la CC sur sa page Facebook le 9 août dans le cadre de la promotion de la chanson de Charli XCX « The Apple’s Rotten Right to the Core » (la pomme est pourrie jusqu’au trognon). Le montage laissant entendre qu’il y avait un lien entre la CC et une pomme pourrie. M. Anon Klinkaew, leader du Centre populaire pour la protection de la monarchie, a porté plainte pour violation de l’article 112 du Code pénal. Anon a déclaré que s’excuser comme l’a fait la société de musique n’est pas suffisant et il réclame un procès.
Pire, M. Sonthiya Sawatdee, royaliste également, se rendra à la police métropolitaine pour demander une enquête sur le musicien Aed Carabao véritable légende vivante en Thailande qui a regretté publiquement la dissolution du parti Move Forward. Le problème vient du fait que Aed Carabao a le statut « d’artiste national » (sorte d’académie des arts et lettres) et que, de ce fait, il ne devrait pas, selon les royalistes, exprimer ses opinions surtout si elles s’opposent aux leurs.