Bangkok, cœur économique de la Thaïlande, est aujourd’hui confrontée à un dilemme structurel majeur : une ville en pleine expansion où les coûts ne cessent d’augmenter, tandis que les salaires stagnent. Ce déséquilibre, qualifié de « paradoxe de Bangkok », met en lumière une métropole moderne dont le dynamisme contraste avec les difficultés croissantes de sa population à maintenir une qualité de vie décente.
Selon un rapport de la Deutsche Bank, les Bangkokois perçoivent en moyenne 28 600 bahts par mois, loin derrière des villes comme Genève ou Zurich où les revenus mensuels peuvent atteindre plus de 250 000 bahts. Cette disparité devient critique lorsqu’on observe le niveau d’endettement : la dette moyenne des ménages de Bangkok équivaut à 181 % de leurs revenus annuels, soit près de 620 000 bahts de dettes pour un revenu de 343 000 bahts par an. À titre de comparaison, le ratio d’endettement à Zurich est d’à peine 51 %.
Cette pression financière est accentuée par un coût de la vie en constante augmentation : loyers, transports, alimentation, électricité… tout devient plus cher, sans que les salaires suivent le rythme. L’inflation dépasse la croissance des revenus, entraînant une perte progressive de pouvoir d’achat. Pour compenser, de nombreux foyers ont recours au crédit, s’enfonçant dans un cycle d’endettement difficile à enrayer.
Cependant, l’inflation telle que constatée par la Banque centrale est quasi inexistante. Si le kilo de mangues reste modeste, le prix des services augmente.
Ce paradoxe est également nourri par la forte dépendance de Bangkok aux secteurs des services et du tourisme, des piliers économiques volatils et vulnérables aux fluctuations mondiales. Ainsi, même si la ville affiche un développement urbain impressionnant et attire les investissements, la majorité des habitants en ressentent peu les bénéfices concrets.
La croissance ne s’accompagne pas d’une redistribution équitable des revenus, laissant de nombreux Bangkokois en marge des progrès annoncés. Pour espérer corriger ce déséquilibre, des réformes structurelles s’imposent : maîtrise des prix, amélioration des salaires, politique d’endettement responsable, et surtout une stratégie économique centrée sur la stabilité et l’inclusion. En somme, Bangkok doit apprendre à concilier modernité et équité pour que sa prospérité devienne réellement partagée.
