Parti du Peuple
Ce mercredi matin, le chef du Parti du Peuple, Nattapong Ruengpanyawut, a annoncé que son parti soutiendra Anutin Charnvirakul, leader du Bhumjaithai Party, comme prochain Premier ministre. Cette décision, prise après de longues délibérations internes, intervient dans un contexte de paralysie politique et d’absence de majorité claire.
Les 143 députés du People’s Party voteront pour Anutin, mais sous cinq conditions strictes : dissolution du Parlement dans les quatre mois, organisation d’un référendum sur la réforme constitutionnelle, création d’un comité d’amendement de la Constitution, interdiction pour Bhumjaithai de former un gouvernement majoritaire, et refus du Parti du Peuple de participer à la coalition ou d’occuper des postes ministériels.
Cette position, bien que décisive, ne résout pas l’équation parlementaire. En refusant de rejoindre la coalition, le Parti du Peuple laisse Bhumjaithai avec seulement 130 sièges, bien en dessous du seuil de confiance nécessaire pour gouverner efficacement. Face à cette impasse, le secrétaire général du Pheu Thai, Sorawong Thienthong, a confirmé que le Premier ministre par intérim, Phumtham Wechayachai, a soumis un projet de décret royal pour dissoudre la Chambre des représentants.
Selon Sorawong, cette dissolution est devenue inévitable : « Le pays ne peut pas avancer ainsi. Une coalition minoritaire ne tiendra pas. » Il affirme que Phumtham dispose de l’autorité légale pour demander cette dissolution, sur la base des analyses des juristes du parti.
Ce virage politique pourrait déboucher sur de nouvelles élections, mais il met surtout en lumière l’éclatement du paysage partisan thaïlandais. Le soutien sous conditions du Parti du Peuple à Anutin Charnvirakul apparaît comme une manœuvre visant à empêcher le retour de Prayut Chan-o-cha, ancien général arrivé au pouvoir par un coup d’État.
Des rumeurs persistantes laissent entendre que Thaksin Shinawatra, figure tutélaire du Pheu Thai, aurait envisagé de soutenir une candidature de Prayut pour reprendre les rênes du gouvernement. En 2023, son nom figurait d’ailleurs parmi les prétendants au poste de Premier ministre, ce qui lui confère une forme de légitimité institutionnelle.
Pourtant, à ce stade — et peut-être même après un nouveau scrutin — aucune majorité cohérente ne semble en mesure de gouverner durablement. Le Parlement se divise en trois blocs : une droite dure incarnée par Bhumjaithai et les partis liés à l’armée ; un centre droit populiste dominé par Thaksin et le Pheu Thai ; et un courant progressiste représenté par le Parti du Peuple, encore novice en matière de gouvernance.
Cette configuration instable laisse présager une nouvelle phase d’incertitude politique, comparable à celle que traverse actuellement un certain pays européen confronté à une fragmentation parlementaire chronique. Faute de consensus, la Thaïlande risque de s’enliser dans une série de gouvernements minoritaires, incapables de répondre aux défis économiques et sociaux qui s’accumulent.
À ce stade, deux questions se posent :
1- Est-ce que le Premier ministre par intérim a réellement le droit de dissoudre l’Assemblée ?
2- Est-ce que cette dissolution rend caduc le vote prévu demain à l’Assemblée pour élire un nouveau Premier ministre ?
