
En juin 2025, la Première ministre thaïlandaise Paetongtarn Shinawatra fait face à une double crise, politique et diplomatique, qui fragilise sévèrement son autorité. Dépourvue d’expérience politique, mais issue du puissant clan Shinawatra, elle est confrontée à la défection du deuxième plus grand parti de sa coalition, plaçant son gouvernement sur un fil. L’UTN, formation ultra-conservatrice clé pour sa majorité, menace de basculer dans l’opposition si elle ne démissionne pas. La coalition hétérogène qu’elle dirige risque ainsi l’effondrement en cas de désistements supplémentaires, ouvrant la voie à des scénarios tels que la dissolution du Parlement ou la désignation d’un nouveau chef.
Vendredi, elle a rencontré le général de corps d’armée Boonsin Padklang, en charge du Nord-Est du pays, dans la province d’Ubon Ratchathani. La visite de Paetongtarn a ajouté au malaise tant son attitude a semblé soumise devant Boonsin, un militaire charismatique devenu la figure de proue utilisée (à son insu ?) par les ultranationalistes, ultraconservateurs et ultraroyalistes.
Ce contexte tendu s’est aggravé à la suite de la divulgation d’un appel téléphonique entre Paetongtarn et l’ancien Premier ministre cambodgien Hun Sen, enregistré à son insu. L’objectif de l’échange était de calmer les tensions à la frontière après la mort d’un soldat cambodgien, mais le ton vulnérable de la dirigeante, appuyant sa légitimité sur des liens familiaux, a été interprété comme un aveu d’impuissance. Elle y qualifiait notamment le général Boonsin Padklang d’« opposant », attisant les critiques de l’establishment militaro-royaliste et réveillant les souvenirs des coups d’État contre son père et sa tante.
Selon CSI LA, la conversation révèle un déséquilibre flagrant : Hun Sen y apparaît ferme, méthodique et stratégique, tandis que Paetongtarn expose les faiblesses de son leadership. L’analyste Panitan Wattanayagorn dénonce une sérieuse faute de protocole diplomatique, illustrant une gestion amateur des affaires extérieures et des failles dans la coordination gouvernementale. Le non-respect des procédures usuelles – telles que les briefings inter-institutions et les dispositifs de confidentialité – témoigne selon lui d’un entourage incapable de freiner un faux pas politique majeur.
Hun Sen apparaît, depuis le début de la crise, comme un joueur d’échec qui assène les coups de maître. Cependant, on ne comprend pas sa stratégie, car, à terme, le Cambodge a tout à perdre de ces conflits avec la Thaïlande.
Au plan diplomatique, cette fuite a compromis la relation bilatérale avec le Cambodge, Bangkok dénonçant une violation de l’étiquette diplomatique. Hun Sen, de son côté, laisse entendre qu’une confiance forgée sur plusieurs décennies a été brisée.
Dans ce contexte de tension civilo-militaire et d’incertitude économique, marqué par une chute boursière significative, l’opposition réclame sa démission. Paetongtarn a choisi de rester en place et de s’excuser publiquement, mais cette posture ne semble ni convaincre ses partenaires ni restaurer son autorité. Certains observateurs estiment que le Cambodge pourrait exploiter ce vide politique pour faire avancer ses intérêts territoriaux.