
Mae Sot, Thaïlande — La frontière entre la Thaïlande et la Birmanie est le théâtre d’un afflux massif de « réfugiés » depuis le raid militaire mené par la junte birmane contre le complexe de KK Park, situé dans le canton de Myawaddy, en État Karen. Ce centre, connu pour ses activités d’escroquerie en ligne, a été pris d’assaut lundi, poussant des centaines de ressortissants étrangers à fuir vers la Thaïlande.
Jeudi matin, 677 personnes ont traversé la rivière Moei pour rejoindre le district de Mae Sot, dans la province de Tak. Les autorités thaïlandaises ont installé quatre centres d’accueil temporaires, déjà proches de la saturation avec plus de 800 personnes enregistrées. La plupart sont des ressortissants chinois âgés de 20 à 45 ans, souvent sans passeport. Des vérifications biométriques ont révélé que certains sont recherchés à l’international.
Outre les Chinois, des Vietnamiens, Indonésiens, Pakistanais et Philippins figurent parmi les fuyards. Tous sont soumis à des contrôles stricts par les autorités thaïlandaises, qui coordonnent avec les services d’immigration pour identifier les individus et vérifier leurs antécédents judiciaires.
Le raid a permis la saisie de plus de 30 récepteurs Starlink, utilisés pour contourner les coupures d’internet et maintenir les opérations frauduleuses. SpaceX a annoncé avoir désactivé plus de 2.500 terminaux liés à ces réseaux. Ces centres, souvent installés dans des zones reculées du Triangle d’Or, recrutent sous de faux prétextes avant de contraindre les victimes à participer à des arnaques sentimentales ou commerciales.
Face à l’ampleur du phénomène — estimé à 37 milliards de dollars par an selon l’ONU — la Chine, la Thaïlande et la Birmanie ont lancé une campagne conjointe pour démanteler ces réseaux. Mais, selon plusieurs experts, les opérations militaires restent symboliques, orchestrées en accord avec les milices locales pour préserver les intérêts économiques tout en apaisant Pékin, irrité par l’implication de ses ressortissants. La Chine préférerait que ses ressortissants ne soient pas explicitement identifiés comme « chinois » dans les articles de presse, mais simplement comme « étrangers ».
Alors que les arrestations se multiplient au Cambodge et en Birmanie, la Thaïlande se retrouve en première ligne pour gérer les conséquences humanitaires de cette lutte contre les cyberfraudes.
Il est encore difficile de faire la part des choses entre les victimes de traite humaine, les exécutants opportunistes attirés par des salaires élevés, et les membres des mafias supervisant les centres d’escroquerie.



