
Un verdict hors norme. Le tribunal criminel de Bangkok a condamné dimanche l’homme d’affaires thaïlandais Prasit Jeawkok à 1 210 ans de prison pour avoir orchestré un vaste système de prêts frauduleux. Derrière ce chiffre spectaculaire, la loi thaïlandaise limite toutefois la peine réelle à 20 ans de détention, plafond légal applicable même en cas de condamnations multiples.
Un système d’arnaques bien rodé
Prasit, ancien président du projet « Return Goodness to the Land », et ses sociétés Nuea Lok Co, Ltd. et Web Sawasdee Public Co, Ltd. ont été reconnus coupables d’avoir attiré des centaines de victimes dans des investissements fictifs. Les procureurs de la division des crimes économiques ont démontré que les accusés avaient violé la loi sur l’emprunt public et la loi sur la criminalité informatique en multipliant les promesses de rendements impossibles.
Le tribunal a retenu 242 chefs d’accusation, chacun passible de cinq ans de prison, soit un total de 1 210 ans. Les deux sociétés ont été condamnées à des amendes de 121 millions de bahts chacune, réduites à environ 80 millions après coopération partielle.
Des peines réduites, mais lourdes
La peine effective de Prasit a été ramenée à 806 ans et 8 mois, une durée qui permet au détenu de méditer sur le bien et le mal. Mais la loi plafonne son incarcération à 20 ans. Son associé Wimgrit, reconnu coupable de soutien au système, a écopé de 111 ans et 148 mois, réduits à 74 ans et 8 mois, mais lui aussi ne purgera que 20 ans. Avec les remises de peine, ces condamnés pourraient être libérés relativement rapidement.
Le tribunal a également ordonné aux accusés de rembourser les dommages subis par 267 victimes, une décision qui s’ajoute à une précédente condamnation. En juillet 2023, Prasit avait déjà été frappé d’une peine de 1 155 ans pour une autre affaire de fraude, également limitée à 20 ans, et sommé de restituer plus d’un milliard de bahts.
Un signal fort contre les escroqueries financières
Si les peines prononcées dépassent la durée de vie humaine, selon les connaissances actuelles de la médecine, elles ont une valeur symbolique : montrer la sévérité de la justice thaïlandaise face aux escroqueries de grande ampleur. Les autorités veulent ainsi envoyer un message clair aux investisseurs et aux citoyens : les fraudes financières ne resteront pas impunies.
Pour les victimes, souvent des particuliers séduits par des promesses de prêts avantageux ou de placements lucratifs, le chemin vers la réparation reste long. Le remboursement ordonné par la justice constitue une étape, mais beaucoup craignent de ne jamais récupérer l’intégralité de leurs pertes.
Une affaire qui marque les esprits
Avec ses chiffres vertigineux – plus de deux mille ans de prison cumulés en deux affaires – Prasit Jeawkok est devenu l’un des symboles des dérives financières en Thaïlande. Son cas illustre à la fois la créativité des escrocs et la difficulté des autorités à protéger les épargnants dans un contexte de digitalisation rapide des services financiers.



