
Treize jours après la reprise des combats à la frontière, la Thaïlande semble déterminée à poursuivre ses opérations militaires contre les forces cambodgiennes. Les frappes aériennes et les destructions ciblées d’infrastructures témoignent d’une stratégie assumée : affaiblir l’appareil militaire de Phnom Penh jusqu’à ce que celui-ci accepte les conditions fixées par Bangkok pour un cessez-le-feu durable.
Le dernier développement en date, le 20 décembre, illustre cette volonté. Des F-16 thaïlandais ont détruit le pont d’O-Chik, dans la province d’Oddar Meanchey, coupant la principale ligne d’approvisionnement des troupes cambodgiennes vers les positions de Hill 350 et Prasat Ta Kwai. Quelques heures plus tard, un ancien casino reconverti en centre de commandement a été neutralisé. Les autorités thaïlandaises ont rejeté les accusations de victimes civiles, qualifiant les informations venues de Phnom Penh de « fake news ». Le message est clair : toute tentative de réparation du pont ou de reprise des flux logistiques sera immédiatement ciblée par de nouvelles frappes.
La Thaïlande conditionne toujours tout cessez-le-feu à trois engagements précis : que le Cambodge déclare le cessez-le-feu en premier, qu’il soit réel et continu – et non une pause tactique –, et qu’il coopère sincèrement au déminage des zones frontalières. « L’armée thaïlandaise ne s’arrêtera pas tant que l’élite cambodgienne n’aura pas accepté ces termes », a martelé le porte-parole de l’Armée de l’air, le maréchal Jakkrit Thamwichai.
Sur le terrain, Bangkok multiplie les actions pour affaiblir l’adversaire. Outre les frappes aériennes, les forces thaïlandaises ont obtenu le démantèlement d’un barrage de sédiments à Ban Hat Lek, dans la province de Trat. Ce barrage, construit par le Cambodge, modifiait le littoral et menaçait les positions maritimes thaïlandaises. Sa destruction, entamée le 20 décembre, marque un succès diplomatique et militaire.
La Thaïlande insiste également sur les retombées indirectes de ses opérations. Selon l’armée, les frappes et démantèlements de sites ont perturbé les réseaux de fraude transnationale installés dans les zones frontalières, contraignant ces organisations à se déplacer et réduisant leur activité en ligne.
Sur le plan diplomatique, Bangkok affirme ne pas céder aux pressions extérieures. Ni Washington ni Pékin ne parviendront, selon le ministère thaïlandais des Affaires étrangères, à imposer une solution défavorable lors de la réunion de l’ASEAN prévue le 22 décembre en Malaisie. La Thaïlande se dit ouverte à une paix « véritable et durable », mais refuse tout compromis qui ne garantirait pas la sécurité de ses frontières.
Pendant ce temps, la Chine et les États-Unis intensifient leurs efforts pour obtenir une désescalade. Pékin a dépêché son envoyé spécial Deng Xijun auprès du Premier ministre cambodgien Hun Manet, appelant à un cessez-le-feu immédiat. Mais sur le terrain, la Thaïlande continue de gagner du terrain, convaincue que seule la pression militaire contraindra Phnom Penh à céder.
Le Cambodge l’a bien compris, mais se trouve complètement désemparé. Accepter un cessez-le-feu maintenant, c’est reconnaître la défaite, voire la déroute, ainsi que l’abandon de temples chéris maintenant réduits à l’état des tas de pierres. Continuer le combat, c’est condamner des soldats et perdre davantage d’infrastructures ou d’armements.
Bangkok estime donc être en train de gagner son pari : imposer ses conditions par la force, afin de transformer une guerre frontalière en levier pour une paix qu’elle veut définitive.



