
La récente montée de tensions à la frontière entre la Thaïlande et le Cambodge, marquée par la mort d’un soldat cambodgien, rappelle l’impact des différends historiques non résolus. Malgré leurs liens culturels et leur appartenance à l’ASEAN, les deux pays restent en désaccord sur des territoires contestés, notamment autour du temple de Preah Vihear. La zone contestée actuellement se trouve autour des temples Ta Moan Thom, Ta Moan Tauch, Ta Krabei et de la région de Mom Bei, tout près de Preah Vihear en direction de la frontière laotienne.
Ce conflit découle d’une démarcation frontalière datant de l’époque coloniale, jamais vraiment acceptée par la Thaïlande malgré la signature d’un accord en 1907. Bien que la Cour internationale de Justice ait confirmé en 1962 et 2013 la souveraineté du Cambodge sur Preah Vihear, des désaccords persistent, alimentés par des interprétations divergentes et des tensions nationalistes.
La Thaïlande et le Cambodge adoptent des positions opposées sur la zone de Mum Bei et d’autres sites. Phnom Penh veut porter l’affaire devant la CIJ, tandis que Bangkok refuse de reconnaître sa juridiction obligatoire, privilégiant des mécanismes bilatéraux. L’armée thaïlandaise menace d’intervenir en cas de violation de « sa souveraineté », accentuant la fragilité de la situation. Le Cambodge nie vouloir entrer en territoire thaïlandais.
Un rassemblement nationaliste de 200 manifestants thaïlandais devant l’ambassade du Cambodge à Bangkok illustre ces tensions. Bien que pacifique et rapidement dispersée, la manifestation témoigne de la persistance du sentiment nationaliste en Thaïlande.
Face à l’escalade, les deux gouvernements poursuivent le dialogue, soutenus par des médiateurs régionaux, notamment le président actuel de l’ASEAN, Anwar Ibrahim. Son implication souligne la préoccupation du bloc pour la stabilité régionale, alors que le rôle de l’ASEAN dans les conflits bilatéraux reste limité par sa politique de non-ingérence.
Le conflit rappelle que la paix exige un dialogue constant et surtout des solutions juridiques claires. Sans résolution définitive, il risque de devenir un conflit prolongé. Une approche basée sur le droit international pourrait permettre aux deux pays de dépasser ces différends pour construire une coexistence plus stable, mais, actuellement la Thaïlande refuse de s’engager dans cette voie.
L’armée thaïlandaise a publié des photos aériennes révélant des activités militaires cambodgiennes à la frontière de Chong Bok, à Ubon Ratchathani, avant l’affrontement du 28 mai 2025. Ces images, comparant les conditions depuis 1954, montrent des creusements de tranchées et la construction de routes d’approvisionnement. À ce stade, on ne sait pas ce qui a incité l’armée cambodgienne à creuser de telles tranchées sur son territoire, ce qui peut être considéré comme une provocation.
Les données militaires thaïlandaises indiquent que le point de conflit se situe dans une zone considérée comme appartenant à la Thaïlande par les Thaïlandais, mais appartenant au Cambodge selon les Cambodgiens. Les photos des dernières décennies montrent qu’aucune présence humaine n’y existait, mais les images récentes dévoilent des mouvements militaires cambodgiens actifs.
Ces travaux violeraient le protocole d’accord de 2000, qui interdit toute modification du terrain en zone frontalière non délimitée. Malgré les protestations officielles de la Thaïlande exigeant l’arrêt de ces activités, aucune réponse favorable n’a été obtenue de la part du Cambodge.
En représailles, le gouvernement thaïlandais envisage de suspendre l’approvisionnement en électricité et en Internet dans les zones du Cambodge proches de la frontière afin de lutter contre les escroqueries téléphoniques opérant depuis ce pays, a déclaré le vice-ministre de la Défense, Nattaphon Nakpanich. Toutefois, cette décision reste délicate en raison des tensions frontalières entre les deux nations.
L’accord récent du Cambodge de retirer ses troupes près du col de Chong Bok a légèrement apaisé la situation, mais les restrictions sur l’immigration et les contrôles transfrontaliers restent en vigueur. La menace de la Thaïlande de couper l’électricité sur neuf points frontaliers a joué un rôle dans ce retrait.
Une réunion de la Commission mixte des frontières est prévue samedi à Phnom Penh pour discuter des affrontements du 28 mai. La délégation thaïlandaise sera dirigée par l’ancien ambassadeur Prasart Prasartwinitchai. Le ministre de la Défense ne sera pas présent, mais le commandant suprême de l’armée agira en tant que conseiller.
La Première ministre thaïlandaise, Paetongtarn Shinawatra, a affirmé avoir mené des négociations directes avec le Premier ministre cambodgien Hun Manet et son père, Hun Sen, président du Sénat. Ces discussions ont abouti à un engagement mutuel pour une résolution pacifique du conflit frontalier par le dialogue.
Elle a souligné que les récentes négociations avec le Cambodge se sont déroulées sans tensions, le gouvernement thaïlandais privilégiant la diplomatie. Les agences de sécurité, notamment les forces militaires, ont reçu des instructions pour coopérer avec leurs homologues cambodgiennes afin de maintenir la stabilité et la souveraineté nationale.
Hun Sen a joué un rôle clé en coordonnant l’intervention de hauts responsables militaires cambodgiens, qui se sont rendus sur place pour évaluer la situation et faire un rapport. Le ministère des Affaires étrangères a confirmé que la réunion du Comité conjoint des frontières (JBC), prévue samedi, se tiendra comme prévu.
Concernant l’intention du Cambodge de saisir la Cour internationale de justice (CIJ), la Thaïlande maintient son refus d’en reconnaître la juridiction et poursuit la gestion du conflit par des moyens diplomatiques. La Thaïlande ne reconnaîtra pas les décisions de la CIJ, car elle anticipe que celle-ci donnera une nouvelle fois raison au Cambodge. En attendant, la Thaïlande fait durer les choses avec des réunions de la JBC qui ne donnent rien afin que ces édifices ne soient pas déclarés Cambodgiens. La Thaïlande espère une sorte de « garde conjointe » des temples. Cette solution ne peut qu’attiser un sentiment hostile dans la population cambodgienne extrêmement nationaliste.
Les nationalistes thaïlandais demandent carrément au gouvernement de rejeter la carte au 1:200000 réalisée par la France, ce qui ouvrirait les champs de tous les possibles à l’armée thaïlandaise en territoire cambodgien.