
La monnaie thaïlandaise continue de surprendre les marchés. Porté par la flambée des cours de l’or et l’affaiblissement du dollar américain, le baht s’est apprécié à un niveau inédit depuis quatre ans et demi, autour de 31,10–31,12 pour un dollar. Certains analystes estiment désormais qu’il pourrait tester rapidement le seuil symbolique de 30 pour un dollar.
Mardi, l’or a atteint un nouveau record proche de 4 500 dollars l’once, stimulé par la faiblesse du billet vert, les tensions géopolitiques entre Washington et Caracas et les achats massifs des banques centrales. Cette envolée a directement soutenu le baht, dont l’évolution reste fortement corrélée au métal précieux. Depuis le début de l’année, l’or a progressé de près de 70 %, tandis que le baht s’est renforcé de plus de 10 %, devenant la devise la plus performante de la région.
Le yen japonais, en hausse de 0,7 % à 156 pour un dollar, a également contribué à l’appréciation du baht, au point que Tokyo a dû avertir d’une possible intervention. « À court terme, il est possible que le baht franchisse le seuil de 31, voire davantage », a confié un trader.
Pour Ratasak Piriyanont, vice-président de Kasikorn Securities, « la corrélation entre le baht et l’or est particulièrement élevée cette année, leurs mouvements étant similaires en direction et en amplitude ». Mais certains économistes, comme Poonyawat Sreesing de la Siam Commercial Bank, soulignent que des facteurs domestiques encore mal identifiés jouent aussi un rôle. La Banque de Thaïlande a tenté de réguler les flux de capitaux, notamment liés à l’argent gris, donc issu des différentes mafias, mais ces mesures prennent du temps à produire leurs effets.
Le débat reste vif sur l’attitude à adopter. Poonyawat met en garde contre des interventions trop strictes, estimant que le marché des capitaux thaïlandais est trop fragile pour supporter un choc réglementaire. Kanjana Chockpisansin, du Kasikorn Research Center, appelle quant à elle à une meilleure coopération entre agences pour suivre les flux d’or et stabiliser la devise.
Le ministère des Finances et la Banque de Thaïlande ont d’ailleurs annoncé trois mesures : obligation pour les plateformes de trading d’or en ligne de déclarer leurs transactions, révision de la fiscalité spécifique et éventuelles limites sur les volumes échangés. Selon le gouverneur Vitai Ratanakorn, ces mesures viseront uniquement les plateformes numériques, dont l’activité représente déjà près de 40 % du PIB lié à l’or et pourrait dépasser 50 % très bientôt.
Avec des échanges quotidiens dépassant 65 milliards de bahts, et des pics à 255 milliards lors des fortes variations de l’or, la monnaie thaïlandaise reste sous haute surveillance. Les prochains mois diront si le baht franchira réellement le cap des 30 pour un dollar.



