Le dirigeant de l’opposition Natthaphong Ruengpanyawut s’est longuement épanché auprès de l’AFP et accuse la cour constitutionnelle, supposée « aux ordres », d’avoir organisé un « coup d’État judiciaire », après la dissolution de son parti qui a gagné les élections de 2023 (MFP) et l’éviction du premier ministre Srettha Thavisin.
Les observateurs thaïlandais dont nous sommes avaient déjà employé le terme de « coup d’état judiciaire ». L’intérêt de cet article de l’AFP, c’est qu’il sera lu partout dans le monde.
Le Parti du Peuple remplace le MFP et se montre actif à la chambre. Natthaphong Ruengpanyawut, considère comme tout le monde que des réformes sont nécessaires mais la plupart des hommes politiques ne le disent pas en public de peur de se faire emprisonner pour crime de lèse majesté.
Natthaphong insiste sur le terme coup d’état judiciaire et affirme : « C’est le signe que la Thaïlande n’est pas une démocratie à part entière ». Personne ne le contredira, le régime lui-même ne prétend pas défendre la démocratie mais pratique plutôt l’autodéfense officielle.
Natthaphong ne se fait pas d’illusion, s’il espère gagner largement les élections, il craint la « justice » qui trouvera toujours un prétexte pour l’empêcher de gouverner. Cependant, il ne souhaite pas de manifestations de masse qui donnent prétexte à l’armée pour fomenter des coups d’état.
Mais voilà que dans la presse en thaï on évoque à nouveau un coup d’état militaire. La nouvelle Première ministre et son nouveau cabinet n’ont pas encore prêté serment, que la presse locale parle déjà d’un possible coup d’État militaire contre le parti Pheu Thai car il a écarté le parti pro-junte Phalang Pracharath ou pour le moins la faction du putschiste Prawit du gouvernement. Les observateurs, amers, constataient mercredi que la Thaïlande est « un pays tenu en otage en permanence par les généraux rebelles de l’armée » selon le grand journaliste Pravit Rojanaphruk.
Cependant nous n’y croyons pas pour deux raisons :
1- le coup d’état judiciaire est beaucoup moins douloureux que le militaire. Paiboon Nititawan, un chef de Phalang Pracharath, parti de la coalition évincé récemment, menace la première ministre Paetongtarn Shinawatra d’un procès et donc d’être « éjectée » par la « justice » pour manque d’éthique. Pour mémoire ce sont des sénateurs proches de ce même parti qui ont obtenu le départ de Srettha. Ruangkrai Leekitwattana un autre membre du même parti est déjà passé à l’acte et a envoyé une lettre à la Commission électorale, concernant la participation de Paetongtarn au capital d’une entreprise privée. D’autres plaintes pour des motifs divers sont en préparation. La « justice » accueille toujours favorablement ces plaintes là.
2- en intégrant le parti démocrate dans la coalition, Thaksin et le Pheu Thai s’achètent une assurance anti coup d’état militaire. Le PD est très proche du régime dont il fut longtemps la face politique avant que l’armée ne lancent ses propres partis récemment. Le parti Pheu Thai a officiellement invité mercredi le Parti démocrate à rejoindre le nouveau gouvernement de coalition, mettant ainsi derrière eux leur rivalité de longue date. Le secrétaire général du Pheu Thai, Sorawong Thienthong, a remis une invitation au secrétaire général démocrate Det-it Khaothong. Les démocrates devraient obtenir deux portefeuille. Le vieux sage du PD, Chuan Leekpai, est opposé à ce mariage contre nature. Tout le monde rappelle que le PD (via le premier ministre Abhisit) est responsable de la mort de dizaines de manifestants pro-Thaksin en 2010.