Plus il y aura de citoyens ordinaires en compétition, plus difficile sera la victoire des personnalités influentes et des grands féodaux.
Les militants politiques profitent de la fête de Songkran pour exhorter leur famille et leurs amis dans leur province d’origine de briguer un siège au Sénat, dans l’espoir de voir de nouvelles têtes au Parlement.
Certains bénévoles et militants se sont rendus dans les gares routières pour tracter. Nutchapakorn Nammueng de Internet Law Reform Dialogue (iLaw), distribue depuis vendredi des brochures expliquant le scrutin sénatorial à Rangsit et au terminal de bus Mor Chit 2. « L’accueil que j’ai reçu de la part des passants a été correct », a-t-il déclaré.
La plupart des personnes avec lesquelles M. Nutchapakorn et ses collègues ont parlé, en particulier les jeunes, avaient entendu parler des élections sénatoriales, a-t-il ajouté.
La campagne visant à inciter les gens ordinaires à se présenter à la chambre haute a débuté au début de ce mois, et jusqu’à présent, 945 personnes ont manifesté leur intention de se présenter. Les militants considèrent que ce n’est pas assez.
iLaw et WeWatch font partie des diverses organisations qui s’unissent pour la campagne visant à encourager davantage de personnes à se présenter au Sénat.
Ils ne veulent pas voir se répéter les élections précédentes au cours desquels des personnalités influentes ont été élues. Personnalités influentes est un euphémismes pour « féodaux » ou « mafieux ». Il s’agit de familles qui « tiennent » une région. Le mari est député et la femme ou le frère est sénatrice.eur. Partant, le Sénat est ridiculisé par les médias et le public et qualifié d’assemblée familiale.
La Chambre haute actuelle, composée de 250 sénateurs, a été entièrement choisie par la junte militaire de Prayut. Son mandat prendra fin officiellement le 11 mai mais les membres resteront en poste jusqu’à ce que leurs successeurs soient choisis. Les nouvelles élections devraient débuter le 22 juin au niveau des districts et le vote national pourrait avoir lieu début juillet. Ensuite, Il suffirait de faire traîner pour que ce Sénat continue de siéger longtemps. Les inscriptions devraient avoir lieu fin mai ou début juin.
Le nouveau Sénat ne comptera que 200 membres élus selon ce qui pourrait être le système électoral le plus compliqué au monde. La Commission électorale (CE) l’a conçu dans l’espoir que la formule compliquée rendrait plus difficile l’achat de voix et le vote en bloc.
L’élection comprend trois niveaux : district, provincial et national. Au niveau des districts, 55 680 personnes seront élues, parmi lesquelles les trois meilleurs candidats de chacun des 20 groupes professionnels et de la société civile répartis dans 928 districts.
Parmi les 20 groupes figurent le droit et la justice, l’éducation, la santé publique, l’agriculture, la science et la technologie, la communication de masse, les employés ou travailleurs, les chefs d’entreprise, les professions liées au tourisme, les industriels, les artistes ou athlètes, les professionnels indépendants, les femmes, les personnes âgées, les handicapés ou les groupes ethniques. Cette classification abracadabrantesque n’est peut-être pas finalisée car considérer les femmes comme un groupe professionnel laisse songeur. Est-ce à dire qu’il ne pourra pas y avoir de femmes représentant les professeurs ou les soignants ?
À partir de ce bassin, 3 080 personnes seront élues parmi les deux premiers à chaque niveau provincial, couvrant 77 provinces.
Enfin, les 200 sénateurs seront élus parmi les 10 premiers candidats de chaque groupe au niveau national.
Bien que le système électoral ait été créé dans un souci d’équité aux yeux de la CE, les militants ont déclaré qu’il favorisait toujours les personnes riches ou affiliées à des partis politiques. Les gens ordinaires pourraient être découragés de se présenter, car participer aux trois étapes prendra beaucoup de temps, et les frais d’inscription de 2 500 bahts semblent élevés pour les plus modestes.
De plus, les jeunes ne seront pas représentés puisque les candidats doivent avoir 40 ans ou plus. C’est un bon moyen d’éliminer les réformateurs plus jeunes que les conservateurs.
Mais M. Nutchapakorn d’iLaw a déclaré que les jeunes électeurs ont encore un rôle à jouer en convainquant leurs aînés de se présenter. Il pense qu’un plus grand nombre de candidats issus des rangs des gens ordinaires pourraient empêcher des personnalités influentes, riches et de grandes familles, d’être sélectionnées comme sénateurs.
« Nous espérons que leur sacrifice pour se présenter aux élections sénatoriales contribuera à une vraie élection. C’est ça la démocratie », a-t-il ajouté.
