Le leader de Move Forward, Pita Limjaroenrat, a officiellement annoncé lundi la formation de son gouvernement de coalition avec sept autres partis, une semaine après les élections législatives.
Il a déclaré lors d’une conférence de presse que c’est un jour historique car c’est le neuvième anniversaire du dernier coup d’État en Thaïlande. La formation du gouvernement marque une transition pacifique dans la politique thaïlandaise, a-t-il déclaré.
Tous les partis signataires ont convenu de gouverner conjointement le pays selon ces valeurs :
- Tous les partis doivent protéger les droits politiques et autres des citoyens.
- Tous les partis travailleront avec honnêteté et s’il s’avère qu’un individu est impliqué dans des actes de corruption, il sera expulsé immédiatement.
- Tous les partis travailleront dans l’honneur et avec sincérité en tenant compte de l’intérêt du peuple, et non de celui de leur propre parti.
- Tous les partis ont le droit de proposer des projets supplémentaires, mais ils ne doivent pas contredire les politiques définies dans cet accord. Ils peuvent le faire par l’intermédiaire de leurs ministres ou de leurs députés.
La plateforme programmatique est reproduite à la fin de cet article. On les connaît : fin de conscription obligatoire, nouvelle constitution (sans pouvoir de nuisance des militaires), mariage pour tous, etc. L’article 112 n’est pas mentionné.
Mais dans le même temps, les ennemis de Pita se déchaînent. Même s’ils sont été ridiculisés dans les urnes, ils n’ont que faire de la volonté du peuple et seul compte leur « bon vouloir ».
Les axes pour abattre Pita sont de 4 ordres. Vieilles magouilles politiques. Dissolution du parti. Invalidation de Pita lui-même. Reprise en main par l’armée qu’on n’aura pas le droit d’appeler coup d’état. Ces axes sont toujours les mêmes mais cette fois, ils se mettent en place de manière tangible.
1- La grosse magouille politique
Palang Pracharath est le parti hétéroclite au pouvoir qui a permis à Prayut de rester en place mais aux méthodes tellement contestables que Prayut lui-même en a été choqué et a formé un autre parti. PP est un parti dont les membres sont prêts à tout pour rester au pouvoir et qui pratique la politique à l’ancienne. Il pourrait s’auto-dissoudre ses 41 députés se vendre au Pheu Thai pour en faire le plus grand parti de Thaïlande (182 députés) selon des sources sérieuses. Pheu Thai serait alors légitime pour créer le gouvernement.
Les députés de PP sont prêts à tout, en particulier à obéir à leur ennemi juré et leader maximo, Thaksin qui manœuvre depuis l’étranger. Anutin (Bumjaithai) a dû démentir s’être rendu à Hong Kong pou sceller un accord avec Thaksin. Qu’il y soit allé ou pas n’a aucune importance, si Anutin, qui affirme lui aussi être prêt à tout pour rester au pouvoir, apporte ses voix à Pheu Thai, ce dernier peut rejeter Pita dans l’opposition.
De nombreux sénateurs, choisis par les putschistes Prawit et Prayut Chan-o-cha s’abstiendront de voter uniquement pour empêcher le chef de Move Forward d’avoir suffisamment de voix pour devenir premier ministre. Mais il voteraient pour un premier ministre proposé par un parti dont certains députés ont fait parti de la coalition soutenant Prayut, soit le « Pheu Thai enrichi ».
Selon l’homme politique, Somsak Thepsuthin, pas plus de 30 sénateurs voteraient pour Pita au poste de Premier ministre, tandis qu’un certain nombre de députés hors coalition pourraient lui apporter leur voix.
Cette magouille trahissant le peuple inciterait Move Forward à rester dans l’opposition.
Prawit devrait démissionner rapidement en tant que chef du Palang Pracharath et même de son poste de député. Prayut ne sera plus rien lorsqu’un nouveau premier ministre aura pris sa place, dans un mois, dans un an. C’en sera fini des putschistes de 2014 qui devraient s’en sortir sans passer par la case prison.
Si Pita échoue à être nommé Premier ministre lors d’une session conjointe Chambre / Sénat programmée dans un avenir proche, soit Paetongtarn Shinawatra, fille du chef de facto du parti, soit Settha Taweesin sera ainsi nommé avec le soutien décisif de la part d’un grand nombre des 250 sénateurs.
Les partenaires de la coalition dirigée par le Pheu Thai auront un total d’environ 280 députés, dont le Bhumjaithai avec 70 députés, parmi plusieurs autres.
La magouille de Pheu Thai pour voler le poste de Premier ministre au chef de Move Forward vient du fait que Thaksin est « considérablement contrarié » par la débâcle de son parti et il voudrait « corriger » le résultat des élections.
Thaksin a fait savoir qu’il avait l’intention de rentrer en juillet prochain après 17 ans d’auto-exil à l’étranger après le coup d’État de 2006.
Le chef du Pheu Thai, Chonlanan Srikaew, qui a toujours dit que son parti ne se livrerait à aucune magouille avec Palang Pracharath, un parti créé par et pour les putschistes, ne peut pas y faire obstacle.
Outre que la population sera dégoûtée au dernier degré, des haut-le-cœur pourraient atteindre le sein même de Pheu Thai surtout si la première ministre est la fille de Thaksin. Cela entérinerait le maintien du système féodal honni par le peuple et l’autre candidat au poste de premier ministre du PT, Settha Taweesin qui semble honnête intellectuellement pourrait s’en trouver choquer.
A terme, Pheu Thai devenu un parti soutenu par l’armée pourrait éclater et ses membres les plus honnêtes rejoindre le MF dans l’opposition.
2- Dissolution du parti Move Forward.
L’ancien dirigeant du People’s Democratic Reform Committee (le mouvement qui a appelé de ses vœux le coup d’état de 2014), Suwit Thongprasert, a déposé une plainte demandant à la Commission électorale d’enquêter pour savoir si la tentative du MFP de modifier la loi 112 violait la constitution, point clarifiéet par la cour en 2021. Si la CE soutient la requête, elle peut demander la dissolution du parti auprès du tribunal.
Suwit a fait valoir que la décision de modifier la loi contredisait la décision de la Cour constitutionnelle de novembre 2021, qui considérait les appels à la réforme de la monarchie comme une tentative de renverser le système de la monarchie constitutionnelle. Dans ce cas, ce que risque le MF n’est pas tant la dissolution que la prison.
En octobre 2018, Suwit a été défroqué après avoir été reconnu coupable d’avoir agressé des policiers. De plus, il a été accusé d’avoir dirigé une société secrète illégale, d’avoir commis un vol et un faux royal. C’est à ce genre de personnage que le régime a recours pour avancer ses pions.
3- Invalidation de Pita.
La plainte est déposée. Tout le monde, Pita en tête, demande une décision rapide de la « justice ».
4- Coup d’état
Pravit Rojanaphruk, le journaliste le plus respecté de Thaïlande A rencontré une de ses sources secrètes de la police – services spéciaux lors de la signature du MOU. Il a déclaré que « l’État profond » ou « on » ne laissera pas Pita devenir Premier ministre parce que les partisans du MFP se sont montrés verbalement très abusifs envers la monarchie. Un coup d’état dans quelques mois est très possible mais l’armée a déjà averti les journalistes : il ne faudra pas l’appeler coup d’état.
Interrogé sur la manière d’empêcher un coup d’État, le chef de Seri Ruam Thai (membre de la coalation MF) et ancien chef de la police, Sereepisuth, rappelle que l’exécution des instigateurs d’un coup d’État condamnés à mort est la méthode la plus efficace. Sans aller jusque là, un procès des putschistes devrait faire réfléchir l’armée qui agit en toute impunité.
Toute magouille empêchant le respect de la volonté du peuple ne peut qu’attiser et qu’accélérer la fin du régime féodal car il y a plus de Thaïlandais que de membre de la « caste ». A moins d’un scénario à la birmane.
- Les détails du protocole d’accord signé par les partis de la coalition sont les suivants :
- Restauration de la démocratie, y compris la rédaction d’une nouvelle Constitution par une Assemblée constituante élue par le peuple dès que possible.
- Réconciliation dans la société. Tous les partis de la coalition feront conjointement pression pour que justice soit rendue dans les affaires impliquant une expression à caractère politique par le biais des mécanismes parlementaires.
- Projet de loi sur le mariage homosexuel pour garantir les droits au mariage pour les couples de tous les sexes, sans forcer ceux qui considèrent le mariage homosexuel comme contraire à leur religion.
- Faire pression pour que la réforme de la bureaucratie, de la police, de l’armée et du système judiciaire soit conforme aux principes démocratiques, en défendant des principes transparents, modernes et efficaces pour le plus grand bénéfice de la population.
- Changer la conscription obligatoire en recrutement volontaire.
- Pousser à la décentralisation en termes de mission et de budget, afin que les autorités locales puissent répondre correctement et efficacement aux besoins des populations locales, sans corruption.
- Faire pression conjointement pour le rétablissement d’une paix durable dans les provinces frontalières du sud de la Thaïlande en garantissant les droits fondamentaux de l’homme, la coexistence dans une société multiculturelle, la participation de tous ainsi qu’un examen des agences liées à la sécurité et des forces de l’ordre.
- Résoudre la corruption en créant un système et une culture gouvernementaux transparents et en permettant l’accès public aux informations de chaque agence gouvernementale.
- Réhabiliter l’économie en augmentant les revenus des personnes, en réduisant les inégalités et en créant un système économique équitable.
- Réviser les lois relatives aux moyens de subsistance des personnes, supprimer les handicaps pour les PME, augmenter la croissance du PIB et aider les produits thaïlandais à être compétitifs sur le marché international.
- Mettre fin aux monopoles et promouvoir une concurrence loyale dans tous les secteurs, tels que les boissons et les boissons alcoolisées.
- Réformer le système de propriété et d’utilisation des terres en poussant des lois de réforme agraire, en soutenant une propriété foncière équitable, en résolvant le problème d’empiétement sur les forets domaniales.
- Réviser les procès politiques
- Améliorer la structure de production d’électricité et la méthode de calcul des prix pour réduire le coût de la vie des gens et créer une stabilité énergétique.
- Mettre en œuvre un nouveau style de budgétisation.
- Créer un bien-être public qui prend soin des personnes de la naissance à la vieillesse.
- Résoudre de toute urgence les problèmes de drogue, re-criminaliser le cannabis et avoir des lois connexes pour contrôler et soutenir ses usages.
- Soutenir une agriculture et un élevage sûrs, protéger les avantages des agriculteurs, réduire le capital de production, soutenir la commercialisation et soutenir l’accès à la technologie.
- Appui au groupement des agriculteurs pour la planification de la production et la protection des bénéfices.
- Modifier les lois sur la pêche et développer des méthodes de pêche durable.
- Améliorer les droits du travail pour garantir un emploi équitable et des salaires conformes au coût de la vie et à la croissance économique.
- Réformer le système éducatif pour améliorer la qualité et réduire les inégalités, ainsi que soutenir l’apprentissage tout au long de la vie.
- Résoudre les problèmes de pollution atmosphérique, pour atteindre le Zéro émission dès que possible.
- Rétablir le rôle de leader de la Thaïlande dans l’ASEAN et maintenir un équilibre politique entre la Thaïlande et les pays puissants.
