Le premier ministre Srettha Thavisin répond aux accusations d’Arun Saronchai (THAI INQUIRER) pro-démocratie.
Tout d’abord, le point de vue d’Arun.
Dans un paysage politique désespérément en quête de personnalités réformatrices, l’accession de Srettha Thavisin au poste de Premier ministre semblait être un événement capital car il représente une rupture avec les habitués accros au népotisme et au clientélisme.
Le Pheu Thai est historiquement considéré comme une opposition au régime soutenu par l’armée, qui prétend que les soldats servent mieux la nation en « protégeant la démocratie ». Pheu Thai semble souhaiter moins de présence militaire oppressante sur le royaume. Cependant, les récentes déclarations du Premier ministre ont anéanti ces espoirs. Il est prêt à compromettre des principes fondamentaux au nom de l’opportunisme politique.
La position de Srettha à l’égard du Commandement des opérations de sécurité intérieure (ISOC) est peut-être la manifestation la plus triste de cette volte-face décevante. Fondée dans le but apparent de maintenir la sécurité nationale, l’ISOC est depuis longtemps une institution controversée, accusée d’agir comme une milice militaire visant à étouffer les voix démocratiques. Il est facile de trouver des exemples de ses abus de pouvoir. Le projet du parti Move Forward pour éliminer l’ISOC semble, dans ce contexte, nécessaire, surtout si l’on considère le budget annuel de 6 à 8 milliards de bahts que l’organisation engloutit de manière opaque (voir ci-dessous) et faisant souvent double emploi avec des rôles que d’autres les agences d’État remplissent déjà.
Pourtant, Srettha a décidé de garder l’ISOC, affirmant qu’il sert à « prévenir et réduire les malentendus » que les gens ont à l’égard de l’armée (ce qui ne veut strictement rien dire). Cette déclaration est décevante pour un pseudo défenseur de la démocratie. Srettah semble vouloir plaire aux militaires. La situation est encore compliquée par l’alliance de Pheu Thai avec des partis pro-putschistes comme Palang Pracharath et United Thai Nation.
Cela soulève la question : Srettha Thavisin est-elle devenu une simple marionnette, voire un larbin des militaires ?
Bien qu’il ait annoncé que l’armée abandonnerait quelque 9 276 rai de terres pour des projets publics et de gestion de l’eau, ce geste apparaît comme une tentative de détourner l’attention du problème principal : l’existence problématique de l’ISOC et son rôle dans l’érosion de la démocratie.
Par ailleurs, quand l’armée dit qu’elle fait « cadeau » de ces terrains à la population, c’est un abus de langage. Il n’y a aucun cadeau car ce qui appartient à l’armée appartient déjà au peuple. L’armée est au service du peuple et non l’inverse.
Tout cela indique une volonté inquiétante de la part du Premier ministre de permettre que l’influence militaire persiste dans la politique thaïlandaise.
Que souhaite Srettha : la longévité politique (pour éviter le prochain coup d’état) ? La population voulait un dirigeant prêt à atténuer l’influence militaire dans la politique. C’est donc raté.
Dans un paysage politique, issu des urnes, aspirant à un leader qui défendrait démocratie et liberté, Srettha Thavisin prouve qu’il n’était pas ce leader. La véritable tragédie ici c’est que le « régime » garde les rênes et maintient tout véritable progrès démocratique hors de portée du peuple thaïlandais.
Srettha Thavisin, largement mis en cause répond ici :
Cette analyse est trompeuse et je voudrais remettre les pendules à l’heure. La dissolution de l’ISOC n’a jamais fait partie de la politique du Parti Pheu Thai (PTP), ni avant, ni pendant, ni après les élections. Ma déclaration de politique générale au Parlement le prouve.
Cependant, le PTP et le gouvernement dirigé par le PTP entendent moderniser l’armée et l’intégrer dans le processus démocratique. Nous reconnaissons que la mission historique de sécurité nationale de l’ISOC, qui remonte à l’époque de la guerre froide, n’est plus aussi pertinente aujourd’hui.
Sous mon administration, il est de mon devoir de veiller à ce que les rôles de l’ISOC s’alignent sur les valeurs démocratiques, en défendant les droits et en préservant la liberté de nos citoyens. Nous croyons aux changements progressifs, en particulier après deux décennies de conflits politiques et idéologiques.
Nous ne choisissons pas une voie de confrontation (avec l’armée), mais plutôt une voie d’harmonisation des idées et de travail pour le bénéfice du peuple.
Enfin, je suis le Premier ministre du PTP, élu par le peuple et soutenu par le Parlement. S’il vous plaît, ne sapez pas la voix du peuple. Si je ne suis qu’une marionnette, je suis la marionnette du peuple.
Srettha oublie qu’il a perdu les élections et que ce fameux « peuple » a voté pour Move Forward et que lui, Srettha, a été élu par l’armée (grâce aux sénateurs nommés par icelle).
Enfin, il est important de noter qu’un sondage prouve que les Thaïlandais souhaitent que Srettha s’attaque en priorité aux problèmes économiques et non aux réformes politiques. A date, l’économie va de mal en pis et la seule stratégie de Srettha, outre de jouer les VRP à l’international, c’est d’attirer toujours plus de touristes dans le royaume.
Le ministre de la Défense SUTHIN Khlangsang devrait se pencher sur les « financements secrets » régulièrement accordés à l’Internal Security Operations Command (ISOC) et veiller à ce qu’ils ne glissent pas dans les poches des généraux de l’armée.
Somchai Srisutthiyakorn (homme politique progressiste) a posté sur sa page Facebook un message pour suggérer à Suthin d’enquêter sur le « financement secret » de l’ISOC. Des sommes importantes pourraient être détournées par les généraux en particulier dans le Sud.
Les dépenses liées au « financement secret » de l’ISOC sont toujours restées un mystère, non seulement pour la population mais aussi pour les députés qui sont incités à l’approuver chaque année sans en connaître les détails.
Le financement annuel de sept à huit milliards de bahts n’a pas permis à l’ISOC de ramener la paix et l’ordre dans le Grand Sud.
Somchai demande à Suthin de déterminer si une somme aussi énorme aurait pu être dépensée de manière plus efficace par l’ISOC, dirigé par l’armée.
« Maintenant que vous en avez l’autorité, on ne peut s’empêcher de se demander si vous aurez le courage de changer quoi que ce soit pour améliorer la situation », a déclaré Somchai.
En outre, Somchai appelle Suthin à enquêter sur les allégations selon lesquelles de nombreux officiers de l’armée auraient été virtuellement transférés dans des unités de l’ISOC des zones agitées les plus au sud uniquement pour obtenir une promotion et une augmentation de salaire sans avoir à s’y rendre physiquement.