A l’occasion de la Journée mondiale pour le droit à l’avortement, franceinfo a interrogé des femmes, des militants et des soignants dans sept pays où l’accès à cette procédure reste entravé.
En Thaïlande, elles doivent « emprunter de l’argent » pour avorter
Il y a trois mois, le collectif Tamtang a reçu l’appel à l’aide d’une femme enceinte cherchant à avorter en secret. « Son employeur a découvert qu’elle était enceinte, elle a perdu son travail », relate Nisarat Jongwisan, conseillère de ce groupe féministe aidant les Thaïlandaises dans leur accès à l’IVG. « Elle n’avait que 5 000 bahts (environ 130 euros), mais elle devait voyager du nord de la Thaïlande à Bangkok. Elle était à 20 semaines et le coût de l’IVG était de 13 000 bahts (environ 340 euros). » Seul l’appui financier de Tamtang lui a permis d’avorter.
En Thaïlande, l’interruption volontaire de grossesse est devenue légale jusqu’à 12 semaines en février 2021, puis, sous certaines conditions, jusqu’à 20 semaines en octobre 2022. Mais « des inégalités persistent », souligne Kritaya Archavanitkul, professeure à l’université Mahidol et coordinatrice du réseau Choices Network Thailand. « Il y a des services d’IVG dans 39 des 77 provinces thaïlandaises. Et nous avons découvert que beaucoup de ces services sont privés. » Chonthita Kraisrikul, cheffe de projet au sein du collectif Tamtang, abonde : « A notre connaissance, très peu d’hôpitaux publics sont prêts à pratiquer des IVG. »
"Le coût d'une IVG varie de 5 000 bahts ‒ 15 fois le salaire minimum journalier ‒ à 20 000 bahts. Des femmes pensent que c'est gratuit, mais ça ne l'est pas."
Chonthita Kraisrikul, militante thaïlandaise
Selon Tamtang, 64% des personnes que le groupe accompagne ont un budget inférieur à 2 000 bahts. « Il est difficile pour elles d’emprunter de l’argent, elles doivent mentir », poursuit Nisarat Jongwisan. Le fonds géré par Tamtang est un soutien crucial pour ces femmes, mais « nous ne pouvons pas aider tout le monde », regrette Chonthita Kraisrikul.
Le prénom a été modifié pour garantir l’anonymat de la personne interrogée.