
Arun du Matichon illustre ici le processus des élections sénatoriales au-dessus duquel veille un aigle inquiétant.
Les résultats, étonnants, des élections sénatoriales ne sont que la conséquence d’une constitution adoptée à la suite d’un coup d’État perpétré par des individus qui se méfient de la capacité du public à s’autogouverner, a fait remarquer l’ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra.
« Chaque coup d’État naît d’une méfiance à l’égard des choix du peuple. », a-t-il déclaré.
« Après le coup d’État, l’autorité centrale cherche à contrôler la population au moyen de lois et de la constitution. En fin de compte, nous devons restaurer la confiance dans la capacité du peuple à choisir son gouvernement, à rédiger des lois et à sélectionner ceux qui les font respecter. Les réglementations d’aujourd’hui portent encore les cicatrices du coup d’État passé de 2014″, a-t-il ajouté.
Il a souligné qu’en vertu de la constitution actuelle, une minorité prétendra toujours représenter la majorité. Auparavant, les sénateurs étaient nommés ; désormais, ils sont sélectionnés parmi des candidats qui se cooptent. Il est donc urgent de revenir aux fondamentaux de la démocratie, a-t-il déclaré.
« Nous devons faire confiance au peuple, ne jamais le sous-estimer. Il est capable de penser de manière indépendante. Les décisions de la majorité sont les plus fiables », a-t-il ajouté.
Thaksin pense que l’impact des nouveaux sénateurs sur le gouvernement sera minime ce qui est à voir.
Vendredi, un groupe de candidats battus aux sénatoriales a déposé une plainte pour fraude électorale et autres allégations d’actes répréhensibles appelant la Commission électorale à enquêter immédiatement.
Les actes répréhensibles présumés de la part de candidats « fantoches » lors de la phase finale de mercredi de l’élection complexe comprennent : le fait que certains prête-noms se sont inscrits dans une catégorie professionnelle qui ne correspond pas à leur qualification et la fraude électorale massive par des votes de « blocs constitués » utilisant des prêtes-noms.
Kamrob Panyakaeo, ancien chef de la police et candidat malheureux, affirme avoir des preuves de la « fraude électorale en bloc » pour les candidats associés à un parti politique. Rappelons que les candidats sénateurs n’avaient pas le droit d’être liés à un parti.
Une douzaine d’hôtels proches de Muang Thong Thani, où se tenait l’élection sénatoriale nationale, auraient été utilisés par des « organisateurs de fraude » pour accueillir leurs candidats « prête-noms » et les soudoyer d’une manière ou d’une autre.
Kusumalvati Sirikomut, ancienne députée Pheu Thai et battue mercredi a mis en cause le secrétaire général de la Commission électorale, Sawaeng Boonmee, originaire de Buriram et ancien employé du père du « grand patron » du Bhumjaithai, Newin Chidchob.
Buriram est le plus grand bastion de Bhumjaithai et la province d’origine de la famille Chidchob.
Par ailleurs, Buriram est la province qui obtient le plus de sénateurs soit 14. Bangkok 9, Ayutthaya et Surin 7, Songkhla, Satun et Ang Thong, 6, Amnat Charoen, Si Sa Ket, Uthai Thani, Loei et Nakhon Si Thammarat, 5. Cela fait beaucoup de sénateurs issus de la zone d’influence des Chidchob.
Les observateurs pensent que les Chidchob et le Bumjaithai auraient arrangé l’élection de bon nombre des 200 sénateurs de manière assez grossière. Bien sûr, rappelons que ces sénateurs n’ont pas le droit de faire de la politique mais si la majorité du sénat obéit aux ordres du Bumjaithai, très attaché au régime, cela aura immanquablement une influence sur la vie publique thaïlandaise.
Sawaeng concède que certains des sénateurs pourraient être suspendus par un tribunal à une date ultérieure s’il était évident qu’ils avaient enfreint la loi électorale.
Vendredi, le chef du parti BhumjaiThai, Anutin Charnveerakul, nie que son parti a manipulé les élections sénatoriales sectorielles.
Le Bumjaithai ne représente pas grand chose au niveau national en Thaïlande. Le sondage Institut roi Prajadhipok du 26 mai mentionne 11,2 % d’intention de vote au scrutin par circonscription et 3,5 % d’intention de vote au scrutin de liste. La différence s’explique par une bonne implantation locale en Isan consécutive à une manière traditionnelle de faire de la politique basée sur le clientélisme.
Ce clientélisme serait très utile si on l’appliquait aux sénatoriales d’autant que le système kafkaïen inventée sous la junte Prayut donne l’impression d’avoir été conçu pour permettre ce genre de fraudes.
Personne n’est dupe du Grand N’importe Quoi auquel le régime a condamné la Thaïlande, L’ancien vice-Premier ministre Plodprasop Suraswadi a qualifié l’élection sénatoriale de « la plus dégoûtante du siècle » et il demande à la Commission électorale d’agir. Elle ne devrait pas le faire pour les raisons expliquées plus haut.