La Cour constitutionnelle a été avertie que la troisième candidature de la Thaïlande à un siège au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies (UNHRC) pour 2025-27 en octobre sera compromise si elle décidait de dissoudre le parti d’opposition Move Forward mercredi 7 août.
L’avertissement vient de Chamnan Chanruang, un membre du Mouvement Progressiste, dirigé par l’ancien chef du parti Future Forward, déjà dissous, Thanathorn Juangroongruangkit.
Chamnan a également noté que la Thaïlande accueillera le 6e symposium de l’Association des cours constitutionnelles asiatiques (AACC) à Bangkok le 17 septembre. Il se demande comment la Cour constitutionnelle thaïlandaise osera se présenter devant ses homologues si Move Forward est dissous.
La deuxième tentative de la Thaïlande d’obtenir un siège au CDHNU a échoué en raison du coup d’État de 2014, des violations des droits de l’homme et de l’utilisation abusive de la loi de lèse-majesté.
Cependant, beaucoup de Thaïlandais pensent que le parti Move Forward (MFP) et le Premier ministre Srettha Thavisin survivront aux poursuites engagées contre eux lorsque la Cour constitutionnelle rendra ses décisions respectivement les 7 et 14 août, selon un sondage d’opinion.
L’enquête a été réalisée par l’Institut national d’administration du développement (sondage NIDA) l’un des plus sérieux du pays.
Pensez-vous qu’un parti politique sera dissous ce mois-ci ?
- 32,44% : Je n’y crois pas du tout
- 27,94% : Je n’y crois pas vraiment (total 60 %)
- 24,20% : Oui
- 13,44% : Oui absolument
- 1.98%: No comment
Y-aura-t-il un nouveau premier ministre ce mois-ci ?
- 45,42% : Je n’y crois pas du tout
- 29,62% : Je n’y crois pas vraiment (total 75 %)
- 15,27% : Oui
- 8,63% : Oui absolument
- 1.06%: No comment
Le sondage NIDA a demandé, à ceux qui voient un nouveau premier ministre arriver, qui sera-t-il ?
- 31,95% : Paetongtarn Shinawatra, leader Pheu Thai
- 30,99% : Anutin Charnvirakul, leader du Bhumjaithai
- 11,82% : Général Prawit Wongsuwan, leader de Palang Pracharath
- 8,31% : Pirapan Salirathavibhaga, chef du parti United Thai Nation
- 2,23% : Chaikasem Nitisiri, candidat PM de Pheu Thai
- 14.70%: No comment
Cependant, Plusieurs analystes politiques prédisent que le parti d’opposition Move Forward (MFP), gagnant des élections, sera dissous lorsque la Cour constitutionnelle rendra sa décision mercredi car le régime n’a que faire de l’opinion de la communauté internationale.
Le 31 janvier 2024, le tribunal a considéré que les efforts du MFP pour améliorer / modifier la loi sur lèse-majesté, reflétaient une intention de saper la monarchie constitutionnelle. MF dément farouchement.
Son avenir ne tenant qu’à un fil, le MFP aurait choisi le parti Thinkakhao Chaovilai (TKCV) comme nouveau foyer politique pour ses députés en cas de dissolution. Sirikanya Tansakul, économiste formée en France, deviendrait la nouvelle leader.
Wanwichit Boonprong, de l’Université de Rangsit, a déclaré au Bangkok Post que les chances d’une issue favorable pour le MFP sont minces puisqu’il n’a jamais pu présenter ses arguments à la « justice ».
Outre la dissolution, les leaders actuels du MF dont le charismatique Pita Limjaroenrat pourraient se voir interdits de vie politiques pour au moins 10 ans.
Les observateurs pensent que les députés MF non bannis ne rejoindront pas le Pheu Thai et les partis pro-armée car ceux qui l’avaient fait lors de la dernière dissolution du FF (2020) ont été balayés par les électeurs (2023).
Ensuite que le parti soit dissous et change de nom ou qu’il soit épargné, la question de savoir s’il faut poursuivre les efforts pour améliorer / modifier la loi sur lèse majesté demeure.
Pita pense que Toute mesure contre le premier ministre Srettha ou contre lui-même pourrait une fois de plus plonger le pays dans la tourmente politique à un moment où le gouvernement ne parvient pas à relancer l’économie. « On peut raisonnablement supposer que la démocratie en Thaïlande est attaquée », a déclaré jeudi, Pita, dans une interview à Bloomberg News. La bourse déjà moribonde pourrait agoniser.
Pita a été empêché de former un gouvernement par le régime alors qu’il avait gagné les élections. Move Forward a néanmoins conservé sa popularité et M. Pita reste le choix numéro 1 pour le poste de Premier ministre si l’on en croit les sondages.
La sénatrice Angkhana Neelapaijit a déclaré lundi que la disposition de la Constitution actuelle concernant la dissolution des partis doit être modifiée, car elle nuit à la démocratie. Il est très facile de dissoudre un parti, en Thaïlande, contrairement à ce qu’il se passe dans les autres pays. Cela permet au régime qui, selon certains, tiendrait la « justice », de se débarrasser de ceux qui ne pensent correctement.
Le Grand journaliste Pravit Rojanaphruk rappelle de son côté dans Khaosod que « l’article 112 du Code pénal, est une simple loi, ce n’est ni le Tripitaka, ni la Bible ni le Coran. Ainsi, il peut faire l’objet d’un amendement, si les électeurs, qui détiennent le pouvoir souverain, estiment que c’est le mieux pour le pays. L’ironie de toute cette histoire c’est que la Cour constitutionnelle n’a jamais renâclé lorsque des généraux voyous fomentaient des coups d’état. » A date, Prayut Chan-o-cha n’a toujours pas été traduit devant la justice. Il ajoute que dissoudre le MFP pourrait inciter la jeunesse à se radicaliser.
Outre Move Forward le 7 et Srettha Thavisin le 14, Thaksin passera devant les juges le 19 août pour crime de lèse majesté mais il devrait être épargné tout comme Srettha d’ailleurs, sauf si le régime souhaite voir Anutin devenir premier ministre.
Le fait que les diplomates de toute l’Europe (dont la France), des États-Unis, de la Corée du Sud, du Canada, du Japon ont rencontré Pita vendredi, quelques jours avant qu’il ne soit (possiblement) envoyé dans les poubelles de l’histoire par le régime n’est évidemment pas un hasard. D’ailleurs, le thème de la réunion était « la crise actuelle de la démocratie en Thailande ».